En pleine crise de la pénurie de médecins, le Parlement suisse adopte une décision majeure, à savoir la suppression du numerus clausus pour les études de médecine.
La Suisse pourrait opter pour une réforme inédite afin de pallier la pénurie de médecins
Face à la pénurie croissante de médecins généralistes en Suisse, le Parlement suisse s'apprête à supprimer le numerus clausus, une décision qui pourrait radicalement changer l'accès aux études de médecine.
Avec un nombre croissant de praticiens étrangers et des départs massifs à la retraite, le système médical suisse se retrouve sous pression. En réponse, le Parlement a décidé de lever cette barrière importante à la formation des médecins.
Une réforme radicale pour compenser la pénurie de médecins
Le Parlement suisse a décidé de frapper fort pour pallier la pénurie de médecins qui touche de plein fouet le pays. En votant la suppression du numerus clausus, un examen qui limite l'accès aux études de médecine, les parlementaires espèrent remédier à la situation actuelle où de nombreux cabinets refusent de nouveaux patients en raison de la surcharge de travail. De plus, une part importante des médecins généralistes suisses approchent de la retraite, sans relève suffisante pour les remplacer. Confrontée à cette situation, la Suisse s'est tournée vers des médecins étrangers, avec plus de 3 000 diplômes étrangers reconnus chaque année.
En 2022, environ 6 000 candidats ont tenté de passer l'examen d'entrée, mais seulement un tiers sont parvenus à intégrer les facultés de médecine. Ce taux d'échec élevé a poussé le Conseil des États, à la suite du Conseil national, à approuver à une large majorité la fin de cette sélection stricte.
Un effort nécessaire mais insuffisant ?
Si cette réforme représente une étape majeure, le ministre de l'Éducation, Guy Parmelin, a tenu à tempérer les attentes. Selon lui, la suppression du numerus clausus ne suffira pas à combler les manques. Le nombre de places d'études cliniques, limité par des infrastructures et des budgets restreints, empêchera l'admission massive de nouveaux étudiants. Actuellement, la Confédération investit déjà 100 millions de francs pour augmenter le nombre de diplômés en médecine humaine à 1 300 d'ici 2025, un objectif encore loin d'être atteint.
En dépit des avertissements, la conseillère aux États Marianne Maret reste optimiste. Elle souligne que la demande dépasse largement l'offre et qu'il est crucial d'augmenter les places d'études et de stages cliniques, notamment pour les médecins généralistes, souvent dévalorisés au sein du système.
Vers une sélection basée sur des compétences humaines
Outre l'élargissement du nombre d'étudiants, les parlementaires suisses plaident pour une révision des critères de sélection. Le numerus clausus actuel se concentre essentiellement sur les compétences cognitives, sans prendre en compte des qualités indispensables pour les médecins, telles que la résilience, la gestion du stress ou les compétences sociales.
Sébastien Jotterand, coprésident de l'Association médecins de famille Suisse, soutient cette approche. Il plaide pour la mise en place de stages pratiques avant et pendant les études, afin que les futurs médecins puissent se confronter directement aux réalités du métier. Selon lui, cette immersion permettrait aux étudiants de mieux évaluer leur compatibilité avec la profession et d'éviter les reconversions après plusieurs années d'études coûteuses.
La question de l'autonomie médicale suisse
Bien que la suppression du numerus clausus et la révision des critères de sélection soient des pas dans la bonne direction, la question de l'autonomie médicale suisse reste complexe. Actuellement, la majorité des médecins en exercice ont suivi leurs études à l'étranger, ce qui reflète la difficulté du pays à former suffisamment de praticiens localement. Selon Marianne Maret, conseillère aux États, il est impératif d'améliorer l'offre de stages et d'études cliniques pour attirer davantage d'étudiants vers les professions médicales en Suisse.
Néanmoins, Guy Parmelin souligne que même avec ces réformes, la Suisse ne pourra pas se passer totalement des médecins formés à l'étranger, tant que les conditions de travail des médecins ne s'améliorent pas. Le rythme de travail intense et la difficulté à équilibrer vie privée et vie professionnelle incitent encore de nombreux médecins à quitter la profession, exacerbant ainsi la pénurie.