Cela fait des années que les transferts financiers vers la Wallonie font l’objet de débats politiques houleux, particulièrement chez les nationalistes flamands représentés par les partis N-VA et Vlaams Belang. Une étude menée par deux professeurs d’économie à la demande du gouvernement flamand, a révélé la complexité de la question et la nécessité d’éviter les raccourcis pour comprendre les choses.
Mais c’est quoi tout cet argent envoyé à la Wallonie depuis la Flandre et surtout Bruxelles ? Les professeurs Willem Sas et Tom Truyts de l’université de Louvain Saint-Louis (Bruxelles) ont tenté une réponse et ont trouvé que le grand flux monétaire du nord vers le sud de la Belgique n’est pas aussi simple que les nationalistes flamands le clament. Eux qui utilisent notamment cette question pour réclamer une réforme institutionnelle profonde.
Les deux professeurs ont analysé en profondeur les différents impôts, taxes et autres cotisations pour comprendre exactement d’où viennent les millions d’euros qui part de la Flandre et de Bruxelles vers la Wallonie. C’est le cas des cotisations de la sécurité sociale des employés et des employeurs, des allocations familiales et de chômage ainsi que les pensions. C’est le cas aussi de la TVA et de l’Impôt sur le revenu des personnes physiques (IPP).
8,5 milliards vont de Flandre vers la Wallonie
Sas et Truyts ont découvert qu’en 2023, 8,5 milliards d’euros ont été transférés de la Flandre vers le sud du plat pays. Durant la même année, Bruxelles a envoyé la somme de 2,9 milliards d’euros. Cela donne la somme de 1259 euros envoyée par chaque Flamand et celle de 2100 euros envoyée par chaque Bruxellois à la Wallonie. A ce titre, chaque Wallon a reçu en moyenne en 2023 la somme de 2491 euros venus directement de la Flandre et de Bruxelles.
Mais si l’on prend tous ces chiffres de façon carrée, l’on peut croire que la Flandre et Bruxelles sont en train de nourrir la Wollonie, mais l’étude des professeurs Sas et Truyts a aussi révélé certaines nuances, nécessitant des précisions d’une importance capitale.
Des Flamands bénéficient aussi des transferts sociaux
« Tous les Flamands ou Bruxellois ne sont pas contributeurs et tous les Wallons ne sont pas bénéficiaires. Quelqu’un qui gagne plus contribuera davantage aux transferts que quelqu’un qui a un bas salaire », précise Willem Sas. Pour lui, un riche de la province de Liège enverra également de l’argent à un pauvre ou un malade de Gand. C’est cela le principe de fonctionnement d’un Etat qui redistribue la richesse.
L’étude des professeurs Sas et Truyts permet de savoir que ces transferts d’argent sont un mouvement normal dans un Etat qui régit les affaires sociales et beaucoup de Flamands en bénéficient, comme ceux de la province de la Flandre occidentale en raison de la présence sur son territoire d’un nombre important de retraités.
La population vieillissante de la Flandre va bientôt bénéficier des transferts sociaux
L’étude révèle aussi que Bruxelles, la capitale, et Brabant paient plus pour les autres provinces de Belgique et elles continueront à payer plus, dans la mesure où la capitale attire les jeunes employés qui cotisent. Et ce sont ces cotisations que l’Etat fédéral se charge de redistribuer. Cela montre que les transferts d’argent ne se font pas du nord vers le sud, mais de la base de l’activité économique vers sa périphérie.
D’ailleurs, la même étude prévoit un transfert plus important vers de nombreuses provinces de Flandre qui avancent vers le recensement d’une population de plus en plus vieille, se rapprochant de la retraite et de l’inactivité. Ce sont donc des populations qui auront besoin de leurs pensions, de leurs soins ainsi que des allocations de toutes les provinces de Belgique.