Le marché de l’armement reste un créneau à la fois sensible, stratégique et juteux. Il est aussi une référence en matière d’avancée technologique des pays dans le domaine. Ces dernières années, la France a réussi un véritable bond en se hissant à la deuxième place mondiale des pays exportateurs d’armes.
Situation géopolitique oblige, avec l’éclatement de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, « les importations d’armes majeures par les États européens ont augmenté de 94 % entre 2014-2018 et 2019-2023, tandis que le volume mondial des transferts internationaux d’armes a légèrement diminué, de 3,3 % », indique l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), à travers son rapport sur les « Tendances des transferts internationaux d’armes, 2023 », publié en mars dernier.
Sans surprise, « l’Ukraine est devenue le quatrième importateur d’armes au monde après avoir reçu des transferts d’armes majeures de plus de 30 États en 2022-2023 », note le rapport. Dans la catégorie exportation, celles de « la France ont augmenté de 47 pour cent et ont devancé la Russie pour devenir le deuxième fournisseur d'armes au monde », signale l’institut de Stockholm, ce qui est une grande première pour la France.
Il convient de noter que dans ce registre, les États-Unis restent indétrônables en tant que leader du marché mondial des armes. « Les exportations d’armes des États-Unis, premier fournisseur mondial d’armes, ont augmenté de 17 % entre 2014-2018 et 2019-23, tandis que celles de la Russie ont diminué de plus de moitié (-53 %) ».
Les raisons du succès de l'industrie française de l'armement
Commentant la performance française, Léo Péria-Peigné, spécialiste de l'armement à l'Institut français pour la recherche stratégique, avance deux raisons à ce succès : « Je pense qu'on peut en voir deux principales ». En premier, il cite « d'abord le recul des exportations d'armes russes, conséquence de la guerre en Ukraine ».
Il considère en effet que la Russie devrait d'abord produire pour répondre aux besoins de la consommation nationale avant l'exportation. Et dans un second temps, ajoute-t-il, « il y a le succès de quelques produits spécifiques de l'industrie française comme le Rafale ou quelques systèmes électroniques qui sont des systèmes à très haute valeur ajoutée ».
Léo Péria-Peigné ne s’arrête pas là en termes d’explications. « Quand l'Inde achète du Rafale, ce n'est pas forcément pour la qualité du Rafale en soi, mais c'est aussi parce que le Rafale peut porter des armes que les États-Unis seront plus réticents à vendre. Je pense notamment aux missiles », soutient-il.
Évoquant les échanges avec les Émirats ou le Qatar, le spécialiste y voit en leurs achats « aussi une façon de renforcer une alliance. La France a des troupes postées au Qatar qui font de la formation, qui font de la réassurance. Acheter des armes à la France pour les Émirats, c'est aussi une façon de sceller une alliance et de la durcir ». Il met avant le même raisonnement « quand la Grèce achète des rafales, oui, c'est important, mais la Grèce aussi s'attache un peu le soutien de la France dans ses bisbilles avec la Turquie », analyse-t-il.