Sunrise a marqué son retour sur le marché boursier avec une capitalisation de près de 3,2 milliards de francs suisses. Toutefois, les modalités de cette opération, qui favorisent certains actionnaires, suscitent des critiques parmi les investisseurs institutionnels.
Avec une dette héritée de Liberty Global et des exigences de rentabilité accrues, Sunrise pourrait revoir à la hausse les tarifs de ses abonnements. Une tendance qui pourrait également affecter l’ensemble du marché des télécommunications en Suisse.
Un retour en bourse remarqué
Le 15 novembre 2024, Sunrise, l’un des principaux opérateurs télécoms en Suisse, a fait son retour sur la bourse suisse (SIX) après une absence de quatre ans. L’opération, menée dans un contexte boursier morose, s’est déroulée à un prix d’entrée de 44,75 francs suisses par action, valorisant l’entreprise à environ 3,2 milliards de francs. André Krause, directeur général de Sunrise, a sonné la cloche pour marquer cet événement symbolique. Déjà présent lors de la première introduction en bourse de l’entreprise en 2015, à l’époque en tant que directeur financier, Krause a affirmé que cette fois, Sunrise envisageait une présence plus durable sur le marché.
Cependant, certains choix stratégiques liés à cette introduction en bourse font polémique. Une catégorie spéciale d’actions, dotée d’un droit de vote renforcé, a été attribuée aux actionnaires clés de Liberty Global, comme John Malone et Mike Fries. Cette structure permet à ces investisseurs de conserver environ 30 % des droits de vote, une décision jugée peu équitable par plusieurs institutionnels qui défendent le principe « une action, une voix ».
Un marché télécom suisse saturé
L’introduction en bourse de Sunrise se déroule dans un contexte où le marché suisse des télécoms est mature et peu dynamique. À l’image de Swisscom, leader du secteur dont le cours stagne depuis des années, Sunrise ne s’attend pas à une flambée de son action. Les investisseurs misent néanmoins sur des revenus stables et des barrières à l’entrée élevées, rendant les actions attrayantes pour ceux qui privilégient la sécurité à la croissance rapide. Sunrise s’appuie sur des dividendes élevés pour attirer les actionnaires, avec un rendement prévu de 4 %, bien au-dessus de la moyenne suisse de 3 %.
Des prix en hausse pour les consommateurs
Pour les clients privés suisses, l’introduction en bourse de Sunrise pourrait annoncer des changements significatifs. L’opérateur devra prioritairement rembourser les dettes accumulées lors de son rachat par Liberty Global en 2020. Afin de renforcer sa rentabilité, Sunrise pourrait opter pour des hausses tarifaires ou se concentrer sur des offres premium, au détriment d’une stratégie axée sur la conquête de parts de marché.
Swisscom, de son côté, a déjà adopté une approche similaire en réduisant son exposition à la guerre des prix. Christoph Aeschlimann, son PDG, a récemment admis que perdre des parts de marché sur sa marque principale était un compromis acceptable pour améliorer la rentabilité.
Salt, le troisième acteur du marché, continue d’endosser le rôle de casseur de prix sous la direction de Xavier Niel. Cependant, dans un marché oligopolistique comme celui de la Suisse, même Salt ne semble pas vouloir baisser ses prix au-delà du strict nécessaire.
De ce fait, avec Sunrise cherchant à augmenter ses marges et ses dividendes et Swisscom poursuivant une stratégie similaire, l’époque des abonnements télécoms accessibles semble toucher à sa fin en Suisse. Pour les consommateurs, ces nouvelles dynamiques pourraient entraîner des augmentations tarifaires et un marché de plus en plus orienté vers la rentabilité plutôt que la compétitivité. Une évolution qui pourrait redéfinir les règles du jeu pour les acteurs et les utilisateurs du secteur télécom suisse.