Les taux de l’emploi et de l’activité en France sont à des niveaux record depuis la crise sanitaire, déclare Jean-Luc Tavernier, directeur général de l’Insee. Pour lui, le marché du travail résiste bien malgré la croissance qui reste faible. Une déclaration qui contraste toutefois avec les prévisions de France Travail qui anticipe une baisse d'embauche sur l’année.
Jean-Luc Tavernier, directeur général de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), voit d’un bon œil la stabilité du taux de chômage à 7,5% au sens du Bureau international du travail, en dépit des 6 000 chômeurs enregistrés au premier trimestre de l’année. C’est celui « d’une forte résilience de notre économie malgré le ralentissement de l’activité au second semestre 2023. Le marché du travail résiste alors que la croissance est faible », a-t-il déclaré, dimanche 19 mai, dans un entretien à La Tribune.
Le DG de l’Insee indique, dans la foulée, que la proportion des personnes en emploi parmi celles en âge de travailler a atteint 68,8 %. Le taux d’activité qui englobe à la fois ceux qui travaillent et ceux qui sont à la recherche d'emploi est à 74,5 %. « Du jamais vu depuis que l’Insee produit ces statistiques (1975), et sans doute même avant », commente-t-il.
L’évolution positive est attribuée à l’apprentissage, mais aussi à une plus grande présence des seniors sur le marché du travail. C’est un effet direct des réformes successives des retraites, note le directeur. « Le taux d'emploi des 55-64 est aujourd’hui à 58,9 %, soit 4,2 points au-dessus de son niveau fin 2019. Plus de la moitié des personnes de 61 ans ont un emploi. Et pour les plus de 59 ans, c’est même plus de 70 %. En revanche, à 62 ans et au-delà, on passe en dessous de la barre des 50 % qui travaillent », détaille-t-il.
Sauf que l’enquête annuelle de France Emploi au sujet des besoins de main-d’œuvre des entreprises évoque une seconde baisse de suite sur les intentions d’embauche. Les chiffres enregistrés mettent en avant un recul de 8,5 % en 2024 (2,78 millions) par rapport à 2023 (3,03 millions).
Pourquoi la croissance ne suit-elle pas ?
Autre point pas très réjouissant, c’est que la productivité et la croissance ne suivent pas. « C’est la version « négative » de l’enrichissement de la croissance en emploi », commente Jean-Luc Tavernier. En guise d’explication, il a évoqué « l’apprentissage qui représente un tiers des créations d'emplois et 20 % des pertes de productivité » et « la forte hausse du nombre de microentreprises individuelles a un effet similaire ».
Le patron de l’Insee évoque également certains secteurs, dont l’aéronautique et l’électricité, « qui ont conservé leurs emplois alors qu’ils accusaient une baisse de production ». Dans le secteur public « on voit l’activité des hôpitaux s’infléchir et les embauches augmenter. Mécaniquement, cela engendre une baisse de productivité », ajoute-t-il.
La croissance va-t-elle redémarrer au second semestre 2024 ? « Le risque de récession qu’avaient fait craindre les différentes crises semble derrière nous. Mais il est trop tôt pour savoir si la fin de l’année sera meilleure que le début », rétorque Jean-Luc Tavernier. Il se veut toutefois confiant quant au souci premier des ménages en anticipant une amélioration modérée du pouvoir d’achat. « En avril, l’inflation sur douze mois est à 2,2 %, elle devrait se maintenir autour de ce niveau ces prochains mois. La hausse des prix des produits alimentaires est enrayée », rassure-t-il.
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