Pour lutter contre les erreurs et les fraudes aux aides sociales et familiales, la CAF recourt à une technologie appelée « datamining ». Ce système, basé sur divers critères, évalue chaque bénéficiaire et lui attribue une note. Cependant, cette méthode de notation est critiquée pour son caractère « discriminatoire » envers les allocataires les plus vulnérables, notamment ceux percevant l'AAH.
C'est grâce à près de 50 critères, tels qu'être parent célibataire, bénéficier de l'allocation adulte aux handicapés, avoir un adolescent à la maison ou encore avoir de faibles revenus, que la Caisse d’allocations familiales (CAF) établit un score. Une note grâce à laquelle elle identifie les allocataires les plus susceptibles d’avoir bénéficié indûment d'aides suite à des erreurs, volontaires ou involontaires, dans leurs déclarations de revenus.
La CAF vise « délibérément » les bénéficiaires de l'AAH qui travaillent
Cette technologie est pointée du doigt, car elle cible notamment les personnes précaires. Après avoir obtenu la formule détaillée de deux versions anciennes de l’algorithme utilisé respectivement entre 2010 et 2014 et entre 2014 et 2018 pour contrôler les allocataires, La Quadrature du Net, association de défense des libertés numériques, a dénoncé cette technologie du « datamining » par le biais de sa coordinatrice Myriam Michel.
« C’est bien ce que l’on craignait : l’algorithme de la CAF cible délibérément les plus précaires. Ces facteurs de risque sont en fait des facteurs de précarité et d’instabilité », a-t-elle dénoncé. La Quadrature du Net a ensuite expliqué que les bénéficiaires de l'AAH qui exercent en même temps une activité professionnelle sont particulièrement ciblés. « L'algorithme vise délibérément les personnes en situation de handicap : le fait de bénéficier de l'Allocation adulte handicapé (AAH) tout en travaillant est un des paramètres impactant le plus fortement, et à la hausse, le score d'un allocataire », détaille l'association.
Un ciblage « discriminant et injuste »
« Nos critiques portent tant sur la nature de cette surveillance prédictive aux accents dystopiques que sur le fait que l'algorithme cible délibérément les plus précaires », explique La Quadrature du Net. De son côté, Pascale Ribes, présidente d'APF France handicap, juge le fait de surveiller les bénéficiaires de l'AAH de « discriminant et injuste ». Ce ciblage est un moyen de catégoriser « cette population comme des fraudeurs potentiels », s'insurge-t-elle dans un entretien avec Le Monde.
Par le biais de sa communication publique, la CNAF s'est défendue : « Non, les CAF n’utilisent pas d’algorithme pour "surveiller les allocataires"... Les CAF versent plus d’aides et des aides plus complexes aux plus pauvres et aux personnes isolées. Statistiquement, ces bénéficiaires sont donc surreprésentés parmi les risques d’erreur induits et victimes de plus d’instabilité de leurs droits », a-t-elle écrit sur son compte X.
