La Belgique souffre d’une pénurie de magistrats, les recrutements devront tripler

La justice belge devra tripler ses recrutements d’ici à 2030 pour compenser les départs massifs à la retraite et garantir son bon fonctionnement.

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La justice belge traverse une période de tension préoccupante, marquée par un déficit structurel de magistrats. Ce phénomène s’aggrave à l’approche d’un pic de départs à la retraite qui atteindra son apogée d’ici à 2030. 

Dans ce contexte, les autorités judiciaires tirent la sonnette d’alarme face à l’urgence d’un recrutement massif. Le renouvellement des effectifs devient un enjeu central pour préserver le fonctionnement du système judiciaire.

Une pénurie aggravée par la retraite des baby-boomers

Le Conseil supérieur de la justice (CSJ) tire un constat clair : d’ici à 2030, le nombre de nouveaux magistrats nécessaires devra tripler, pour atteindre jusqu’à 60 recrutements par an. Ce besoin inédit est la conséquence directe du départ massif à la retraite de la génération des baby-boomers, comme l’a expliqué Marc Bertrand, président de la Commission de nomination et de désignation francophone au CSJ, selon L’Avenir. Le système judiciaire belge, déjà mis à mal par un sous-effectif persistant, se trouve désormais confronté à une échéance difficilement contournable.

En 2025, environ 200 postes de magistrats restent vacants. Dans certaines juridictions, comme à Mons ou Liège, les retards dans le traitement des dossiers deviennent significatifs, avec des milliers de procédures en attente. L’accélération du calendrier des départs accentuera encore cette pression sur les juridictions, alors que les conditions de travail sont déjà jugées éprouvantes. Le CSJ anticipe une crise si le rythme de recrutement actuel, déjà insuffisant, n’est pas revu à la hausse. À ce jour, seulement 124 candidats ont réussi l’examen d’entrée en 2024, pour près de 700 inscrits, ce qui illustre le déséquilibre croissant entre les besoins du terrain et les flux de nouvelles recrues.

Le constat est partagé par les magistrats en poste, souvent surchargés de travail. Le manque d’effectifs crée un effet boule de neige : les délais s’allongent, les conditions de jugement se dégradent et la qualité du service rendu au justiciable est fragilisée. Ce contexte complique aussi l’attractivité du métier, perçu comme trop exigeant au regard des conditions salariales et de la charge mentale.

Recruter plus et plus jeune : le pari du Conseil supérieur de la justice

Face à cette situation, le Conseil supérieur de la justice s’est donné pour mission de motiver les étudiants en droit à envisager une carrière dans la magistrature. L’objectif est clair : il faut susciter des vocations suffisamment tôt pour pouvoir répondre aux besoins des prochaines années. « C’est un défi », admet Marc Bertrand. « Les étudiants pensent d’abord à devenir avocats ou juristes d’entreprise, mais rarement magistrats pendant leurs études ». Cette réalité impose un changement de perception de la profession, encore largement méconnue ou mal comprise par les jeunes générations.

Le CSJ multiplie donc les efforts pour renforcer l’attractivité du métier : communication ciblée, témoignages de magistrats, partenariats avec les universités… Ces actions visent à rendre visible le rôle fondamental de la magistrature dans l’État de droit et à rappeler qu’elle constitue une carrière à forte portée sociale, stable et intellectuellement exigeante. L’institution souhaite aussi mettre en avant la perspective d’un rajeunissement de la profession, synonyme de renouvellement des pratiques, d’ouverture et de dynamisme.

L’accès à la profession reste néanmoins complexe. L’examen d’entrée à la magistrature est reconnu pour sa difficulté, ce qui décourage une partie des candidats potentiels. Pour répondre à cette contrainte, des pistes sont évoquées : meilleure valorisation des stages judiciaires, adaptation des modalités d’accès pour les professionnels du droit expérimentés et reconnaissance des parcours diversifiés. Ces évolutions nécessitent cependant du temps pour produire leurs effets, alors que le pic des départs approche rapidement.

La Belgique doit donc affronter un double défi : accélérer les recrutements tout en transformant l’image du métier auprès des jeunes juristes. L’ampleur du besoin impose une mobilisation rapide et structurée, car l’enjeu dépasse la simple gestion des ressources humaines : c’est la continuité de la justice elle-même qui est en jeu.

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