Le secteur de la construction vacille : vers une pénurie de logements en Belgique ?

Le secteur de la construction en Belgique traverse une période difficile, marqué par une baisse des commandes et un climat d’incertitude persistant.

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Le secteur de la construction vacille : vers une pénurie de logements en Belgique ? Crédit : Canva | Econostrum.info - Belgique

Le secteur belge de la construction enregistre un net ralentissement de son activité. À l’origine : des carnets de commandes moins remplis, une explosion des coûts et un climat d’incertitude qui freine les projets, malgré une demande structurellement élevée.

Depuis 2022, l’activité dans la construction ne progresse plus. D’après la fédération Embuild, 51 % des entreprises disposent d’un carnet de commandes moins rempli qu’à l’habitude. La moyenne d’activité tombe à quatre mois de travail garanti, contre six à huit en période normale. La baisse des demandes de devis est également marquée : 59 % des entreprises signalent une diminution, sans perspectives de reprise à court terme. Sur les huit premiers mois de 2025, le secteur enregistre 1.754 faillites, un chiffre en hausse de 7 % par rapport au précédent record de 2024.

Coûts, permis et primes : les freins structurels

Le ralentissement actuel s’explique d’abord par une hausse marquée des prix. Le coût total d’un logement a progressé de plus de 33 % en cinq ans, selon les acteurs du secteur. Un bien acquis pour 300.000 euros en 2020 atteint désormais 400.000 euros avec des finitions équivalentes. Les coûts de construction ont eux aussi fortement augmenté. La crise du Covid, la guerre en Ukraine et l’indexation automatique des salaires ont provoqué une inflation sur les matériaux et les charges salariales, sans possibilité réelle de répercussion totale sur les prix finaux.

Autre difficulté majeure : les permis de construire, trop rares et trop lents à obtenir selon les professionnels. Cela limite l’offre et accentue la tension sur les prix. Du côté des primes à la rénovation, le manque de clarté décourage les candidats bâtisseurs. Les règles changent fréquemment, sans vision à long terme, ce qui crée un environnement instable pour les particuliers comme pour les entrepreneurs.

Une crise qui fragilise aussi les grandes entreprises de construction

La situation n’épargne pas les grands acteurs du marché. Johan De Vlieger, dirigeant de Bostoen, a dû licencier ces deux dernières années en raison de la baisse d’activité. Il constate que les grandes entreprises, autrefois composées de 50 salariés ou plus, sont de moins en moins viables dans ce contexte. La sous-traitance devient une norme pour assurer plus de flexibilité face aux aléas de la demande. Cette transformation a un coût : elle réduit la capacité structurelle du secteur, ce qui prolonge les délais d’attente, même dans un marché moins actif.

Contrairement à ce que pourraient espérer certains consommateurs, les prix ne devraient pas baisser. La marge bénéficiaire des entreprises est déjà réduite, et toute diminution supplémentaire exposerait à davantage de faillites. Pour de nombreux entrepreneurs, les concessions sur les prix ne sont plus envisageables. Les rares marges de négociation portent sur de gros chantiers, et restent limitées. Le climat général est à la prudence, et non à la guerre des prix.

Une demande structurelle mais un secteur sous tension

La population belge continue d’augmenter. D’ici 2070, le pays pourrait compter 1,2 million d’habitants supplémentaires, selon les projections. Pour répondre aux besoins, il faudrait construire 75.000 logements par an et rénover 3 % du parc chaque année. Or, actuellement, le taux de rénovation tourne autour de 1 %. La capacité de réponse du secteur apparaît aujourd’hui insuffisante. Sans réformes profondes sur les permis, les primes, et le modèle économique des entreprises de construction, le risque est de voir la crise du logement s’aggraver dans les années à venir.

Pour les représentants de la profession, la situation actuelle est le résultat d’un empilement de blocages. Si les entreprises sont moins sollicitées, ce n’est pas faute de besoins, mais faute de conditions favorables pour y répondre. Sans un soutien coordonné des pouvoirs publics — à travers une simplification des procédures, une stabilisation des aides et une meilleure anticipation des besoins —, le secteur pourrait continuer à se contracter. Et avec lui, la capacité du pays à répondre à la pression démographique en matière de logement.

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