85% des voyageurs pourraient bientôt perdre leur indemnisation

Les propositions actuelles concernant la révision des droits des passagers aériens risquent de réduire de manière drastique les indemnités et de compliquer davantage les démarches des voyageurs en cas de perturbation.

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Passager aérien
85% des voyageurs pourraient bientôt perdre leur indemnisation | Econostrum.info - Belgique

Actuellement, près de 85 % des passagers qui demandent une indemnisation pour un retard d’avion risquent de perdre ce droit dans un futur proche. Ce changement majeur découle de la révision de la législation européenne sur les droits des passagers aériens, un texte en vigueur depuis plus de vingt ans. 

Selon le Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC), les nouvelles propositions sur la table risquent de réduire considérablement les protections dont bénéficient les voyageurs en cas de retard. Tesachats et d’autres organisations de défense des consommateurs s’opposent fermement à cette réforme qu’elles jugent inacceptable et préjudiciable aux droits des passagers.

Une indemnisation de plus en plus difficile à obtenir

La révision de la législation européenne sur les retards d’avions risque de modifier les règles actuelles qui permettent aux passagers d’être indemnisés. En vertu de la réglementation actuelle, les passagers peuvent réclamer une indemnisation si leur vol arrive avec un retard supérieur à deux heures pour les courts trajets (moins de 1.500 km), trois heures pour les trajets moyens et quatre heures pour les longs vols. Toutefois, dans la nouvelle proposition, cette période de retard serait prolongée à cinq heures pour les courts vols, réduisant ainsi le nombre de passagers éligibles à une indemnisation. Selon le BEUC, de nombreux voyageurs se verraient privés de ce droit légitime en cas de retard.

Les modifications proposées ne s’arrêtent pas là. Un autre élément préoccupant concerne la durée de la période au-delà de laquelle une indemnisation pourrait être demandée. Actuellement, les passagers ont jusqu’à trois ans pour déposer une réclamation. La nouvelle réforme pourrait raccourcir cette période à seulement trois mois, ce qui rendrait beaucoup plus difficile pour les voyageurs d’obtenir une compensation.

Moins de compensations pour certains vols et des démarches plus compliquées

Les propositions de révision ne se limitent pas aux critères de retard. Le montant de l’indemnisation serait également modifié. Pour les trajets courts, les voyageurs recevraient une indemnisation augmentée de 250 à 300 euros en cas de retard supérieur à cinq heures. Cela concerne par exemple les vols de Bruxelles à Barcelone, Varsovie ou Naples. En revanche, les passagers des vols moyen et long-courriers subiraient une réduction importante. Par exemple, un retard sur un vol entre Bruxelles et Athènes, Lisbonne ou Helsinki entraînerait une indemnisation de 300 euros au lieu des 400 euros actuels.

Autre point de friction : le droit des passagers à réserver un autre vol en cas de retard important. Actuellement, les passagers peuvent être réorientés vers un autre vol en cas de perturbation majeure. Toutefois, selon les propositions de réforme, les passagers devront attendre jusqu’à huit heures avant de pouvoir bénéficier d’un vol alternatif, une situation qui pourrait être extrêmement contraignante pour de nombreux voyageurs. Ce changement irait à l’encontre des attentes de la majorité des passagers, qui souhaitent un autre vol au plus vite, selon une enquête réalisée par l’Agence européenne de la sécurité aérienne.

Les démarches pour obtenir une indemnisation risquent aussi de se complexifier. En effet, un nombre important de passagers se voient déjà refuser leur indemnisation en raison de la complexité des procédures administratives et du manque d’information sur leurs droits. Actuellement, un passager sur trois seulement reçoit effectivement une indemnisation. Pour remédier à ce problème, certaines entreprises se sont spécialisées dans l’assistance juridique pour les voyageurs, mais leurs services sont loin d’être gratuits, prélevant parfois jusqu’à 30 % de la somme obtenue. Ce modèle économique a également des répercussions sur les finances publiques, les tribunaux étant souvent saturés par des plaintes de passagers mécontents.

L’urgence d’une révision juste et équilibrée

À l’approche d’une décision qui pourrait être prise d’ici juin, les États membres de l’Union européenne devront faire entendre leur voix sur cette question cruciale. Si les propositions actuelles sont validées, les droits des passagers aériens risquent d’être sérieusement restreints, tout en laissant les compagnies aériennes profiter de profits record. En Belgique, les ministres de la Mobilité et de la Protection des consommateurs sont appelés à défendre les intérêts des voyageurs lors des négociations européennes. Mais si ces derniers ne parviennent pas à faire évoluer le texte dans le bon sens, la situation pourrait se dégrader pour les passagers aériens.

Ce projet de réforme, s’il est adopté dans sa version actuelle, pourrait donc transformer profondément la manière dont les passagers sont protégés contre les retards. Plutôt que de favoriser une meilleure prise en charge des voyageurs, cette révision risquerait d’alourdir encore la situation des consommateurs et de renforcer les inégalités dans le traitement des passagers par les compagnies aériennes.

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