Bruxelles rend contraignante la grille des loyers : ce qui va changer

La Région bruxelloise s’apprête à imposer une grille locative contraignante pour freiner les loyers excessifs et protéger les locataires.

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Bruxelles rend contraignante la grille des loyers : ce qui va changer | Econostrum.info - Belgique

Alors que le marché locatif bruxellois reste tendu, la pression sur les loyers rend l’accès à un logement décent de plus en plus difficile pour les ménages. Face à cette crise persistante, les autorités régionales cherchent à intensifier la régulation des loyers jugés excessifs. 

Jeudi soir, une étape politique importante a été franchie avec l’approbation en commission d’une proposition visant à rendre contraignante la grille indicative des loyers. Ce texte, qui divise la classe politique, pourrait transformer en profondeur les relations locatives dans la capitale.

Une grille indicative des loyers bientôt opposable

Après plusieurs semaines de débats et d’auditions, la commission du Logement du Parlement bruxellois a adopté le 28 mars, à une très courte majorité de 8 voix contre 7, une proposition de loi destinée à renforcer la lutte contre les loyers abusifs. Le texte, porté par le PS et soutenu par Ecolo, le PTB, Groen, Vooruit et Team Ahidar, vise à rendre contraignante la grille indicative des loyers, utilisée jusqu’ici à titre informatif pour évaluer la justesse d’un loyer; a rapporté Le Soir.

Ce dispositif s’inscrit dans la continuité de l’ordonnance de 2021 sur les loyers abusifs, qui avait permis la création de la Commission paritaire locative (CPL). Celle-ci est chargée de rendre des avis sur la légitimité des loyers en se basant notamment sur cette fameuse grille. La nouveauté, cette fois, consiste à interdire explicitement aux bailleurs de proposer des loyers jugés abusifs et à accorder aux locataires un droit à la révision du loyer.

Le texte cible en priorité les premiers segments du marché locatif, où les abus sont les plus fréquents. Il s’agit, selon ses auteurs, de lutter contre les pratiques qui bloquent l’accès au logement pour les ménages à revenus faibles ou moyens. D’après les chiffres avancés par les partis de gauche, plus de 30 000 loyers seraient aujourd’hui considérés comme abusifs en Région bruxelloise, avec une hausse moyenne de 20 % des loyers enregistrée sur les vingt dernières années.

Cette réforme pourrait être votée en séance plénière le 4 avril, pour une entrée en vigueur dès le mois de mai. À ce jour, le texte n’est pas encore inscrit officiellement à l’ordre du jour, mais une demande de modification devrait être introduite afin de garantir son passage en temps utile.

Une fracture politique nette sur le traitement de la crise locative

Le vote de cette proposition a mis en lumière une fracture politique claire entre les partis de gauche, qui soutiennent la réforme, et ceux de droite et du centre, qui s’y opposent fermement. Du côté du MR, Louis de Clippele a dénoncé un texte « précipité, motivé par des considérations électoralistes, et courant dangereusement vers les positions du PTB ». Il pointe un manque de préparation et une absence de consensus sur des points techniques jugés essentiels.

Les critiques concernent notamment la grille des loyers elle-même, considérée comme déconnectée de la réalité du marché. Pour Benjamin Dalle (CD&V) et Mathias Vanden Borre (N-VA), le dispositif présente un risque élevé de démobilisation des investisseurs, ce qui pourrait réduire l’offre de logements disponibles et accentuer encore la hausse des loyers. Joëlle Maison (DéFI) et Imane Belguenani (Open Vld), pourtant issues de la majorité sortante, ont également voté contre, en demandant un report de deux ans de l’entrée en vigueur, afin de revoir la grille de référence.

Les formations de gauche, en revanche, insistent sur l’urgence d’agir face à une crise du logement sans précédent. Elles estiment que cette mesure favorisera les locataires sans mettre en péril l’équilibre du marché. Pour elles, il s’agit d’un signal fort envoyé aux propriétaires, les incitant à respecter des pratiques plus équitables, notamment dans les quartiers populaires les plus exposés aux abus.

L’équilibre reste fragile. Si la proposition est votée le 4 avril comme prévu, elle pourrait constituer l’une des dernières réformes majeures du gouvernement bruxellois avant la fin de la législature.

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