La Belgique poursuit ses efforts pour garantir un accès équitable au cash sur l’ensemble du territoire. Alors que la réduction des distributeurs automatiques se poursuit dans le sillage de la numérisation bancaire, la pression des autorités se fait plus forte pour préserver ce service de base.
L’Autorité belge de la concurrence (ABC) a rendu ses conclusions sur le projet Batopin, né du regroupement des quatre grandes banques belges. Elle juge que cette initiative a porté atteinte aux droits des consommateurs et impose des mesures correctrices concrètes. L’accord qui en découle prévoit l’installation de 70 points de retrait supplémentaires d’ici à 2027.
Une injonction à rééquilibrer le réseau bancaire
Depuis 2020, les grandes banques belges — BNP Paribas Fortis, ING, KBC et Belfius — ont mis en œuvre une stratégie commune sous le nom de Batopin, visant à rationaliser la présence des distributeurs automatiques sur le territoire. Ce projet avait pour ambition de limiter les doublons, de réduire les coûts et de regrouper les automates sous une même bannière neutre, baptisée « Point Cash ». En pratique, cela s’est traduit par une baisse importante du nombre total de distributeurs, suscitant de nombreuses critiques, en particulier dans les zones rurales et peu denses.
L’Autorité belge de la concurrence a ouvert une enquête préliminaire, suivie d’une instruction approfondie, afin de déterminer si cette initiative portait préjudice aux usagers. Sa réponse est sans ambiguïté : le projet Batopin a pénalisé les consommateurs en réduisant leur accès au cash. Au lieu d’infliger une amende à l’entreprise et à ses actionnaires, l’auditeur général Damien Gerard a opté pour une solution négociée. L’accord, qu’il qualifie de « juridiquement contraignant », prévoit des engagements fermes de la part du consortium bancaire.
Parmi ces engagements figure l’installation de 70 nouveaux points cash d’ici à 2027, afin de rééquilibrer la couverture géographique du réseau. Ces nouveaux automates viendront s’ajouter à ceux déjà existants dans le cadre de Batopin, avec pour priorité les zones actuellement mal desservies. Cette décision s’inscrit dans une volonté plus large de garantir l’égalité d’accès à l’argent liquide, quels que soient l’âge, la situation géographique ou la familiarité numérique des citoyens.
Une approche pragmatique saluée par les acteurs publics
Selon Damien Gerard, la solution trouvée évite un contentieux lourd tout en obtenant des garanties concrètes. « L’accord scellé améliorera le quotidien des citoyens », a-t-il déclaré au journal Le Soir, en appelant le monde politique à pérenniser ce dispositif jusqu’en 2030. L’auditeur général souligne qu’il ne s’agit pas d’un simple compromis, mais d’un engagement à long terme dont les effets seront évalués et contrôlés régulièrement. L’objectif est de maintenir un réseau robuste et accessible, dans un contexte où le paiement électronique s’impose de plus en plus.
Cette vision est partagée par plusieurs acteurs du secteur public et associatif, qui voyaient dans la stratégie initiale de Batopin un désengagement préoccupant. Si la mutualisation des distributeurs pouvait se justifier économiquement, elle risquait de créer une fracture d’accès à un service encore utilisé par de nombreux citoyens. L’enquête de l’ABC a permis de documenter précisément l’impact négatif sur certaines populations, notamment les personnes âgées et les habitants de zones rurales.
Le caractère contraignant de l’accord constitue une nouveauté notable. Il impose non seulement l’ajout de nouveaux points cash, mais également une surveillance continue de leur déploiement. Cette logique de transparence et de suivi vise à s’assurer que les engagements ne restent pas théoriques. L’ABC pourra, en cas de non-respect, réactiver son pouvoir de sanction, ce qui donne à l’accord une portée effective.