La banque suisse UBS fait face à une polémique concernant la vente de produits dérivés particulièrement risqués à une partie de sa clientèle. Ces instruments financiers, proposés via son département Global Wealth Management, ont causé des pertes financières lourdes, parfois de plusieurs millions de francs.
Cette situation soulève des questions sur la gestion du risque, la transparence des conseils prodigués, ainsi que sur la protection des investisseurs, notamment les plus modestes. La controverse met en lumière les enjeux éthiques et réglementaires auxquels les grandes banques doivent répondre dans un contexte de marchés financiers de plus en plus instables.
Des produits dérivés complexes aux risques déséquilibrés
Le département Global Wealth Management (GWM) d’UBS, qui regroupe environ 10 000 conseillers, s’adresse principalement à une clientèle fortunée mondiale. Cette division, dirigée par Iqbal Khan et Rob Karofsky, gère des milliers de milliards de dollars. Parmi les produits proposés, figurent des instruments dérivés hautement spéculatifs tels que les Range Target Profit Forwards ou Conditional Target Redemption Forwards. Ces produits sont souvent basés sur des paris portant sur l’évolution de paires de devises ou de métaux précieux comme l’or et le palladium, avec un fort effet de levier.
Le problème principal réside dans la structure asymétrique des risques. Selon l’avocat Nicolas Ollivier, spécialiste en droit financier, un cas analysé montre qu’un client pouvait gagner au maximum 54 000 francs, alors que le risque de perte atteignait 2,9 millions de francs, soit plus de 50 fois le gain potentiel, relate Blick. La probabilité de subir cette perte était évaluée à près de 44 %. Ces produits sont donc comparables à des « armes de destruction financières », selon le qualificatif célèbre de Warren Buffett. Ils s’appuient sur des hypothèses de marchés stables, ce qui ne correspond pas à la réalité : les fluctuations importantes, notamment après le « Liberation Day » du 2 avril 2025, ont déclenché de nombreux appels de marge (margin calls), forçant les clients à injecter des liquidités ou subir de lourdes pertes.
Cette complexité et le déséquilibre du rapport risques/récompenses sont rarement bien compris par les investisseurs, même fortunés. La documentation fournie met souvent en avant des périodes d’analyse trop courtes et masque la gravité des baisses possibles. Par conséquent, de nombreux clients, notamment en Suisse orientale et dans des lieux comme Saint-Moritz, ont été piégés malgré les mises en garde sommaires. Le département local de Wealth Management, sous la responsabilité d’August Hatecke, est directement impliqué dans le suivi des clients concernés.
Conséquences financières et réponses d’UBS face à la crise
Les pertes engendrées ont provoqué une forte insatisfaction parmi les clients, certains ayant vu leur capital fondre de manière spectaculaire en peu de temps. Le climat de volatilité accrue sur les marchés financiers depuis les annonces protectionnistes de Donald Trump a accentué ce phénomène, entraînant un effondrement des cours, une chute du dollar face au franc suisse et une onde de choc sur les marchés dérivés. Ces conditions ont exposé la vulnérabilité des produits structurés proposés.
UBS reconnaît que la volatilité extrême a impacté certains placements, mais souligne que la majorité de ses clients possèdent des portefeuilles diversifiés qui ont mieux résisté à cette période instable. La banque indique aussi examiner des solutions pour accompagner les clients lésés. Toutefois, elle ne communique pas sur le nombre exact de clients concernés, et l’autorité suisse de surveillance des marchés reste discrète sur cette affaire.
La banque et ses responsables, parmi lesquels Iqbal Khan, sont sous pression pour adapter leur approche, tandis que la réglementation suisse pourrait être appelée à évoluer pour mieux protéger les investisseurs face à ce type d’instruments.








