Taxe progressive sur les grands voyageurs aériens : Une mesure pour limiter l’impact environnemental du transport aérien

La proposition de Christophe Clivaz d’instaurer une taxe progressive sur les grands voyageurs aériens pourrait constituer un levier intéressant pour réduire l’empreinte carbone de l’aviation en Suisse.

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Taxe progressive sur les grands voyageurs aériens : Une mesure pour limiter l'impact environnemental du transport aérien : Crédit : Canva | Econostrum.info - Suisse

La lutte contre le réchauffement climatique passe par une réduction drastique des émissions de CO2, et parmi les secteurs les plus polluants, l’aviation figure en bonne place. En Suisse, où les habitudes de vol sont bien plus ancrées que dans la plupart des pays voisins, la question des voyages fréquents en avion devient de plus en plus pertinente. 

Le conseiller national Christophe Clivaz, membre des Verts, propose une taxe progressive pour inciter à limiter ces déplacements excessifs. Cette initiative viserait les voyageurs fréquents, ceux qui contribuent disproportionnellement à l’empreinte carbone du pays, et s’inscrit dans une volonté de responsabiliser les citoyens face aux enjeux climatiques.

L’impact environnemental des voyages fréquents : Un constat alarmant

Le secteur aérien représente près de 2,5 % des émissions mondiales de CO2, mais une proportion importante de ces émissions provient de seulement 1 % de la population mondiale. Ces voyageurs réguliers, bien que minoritaires, génèrent une quantité d’émissions disproportionnée. En Suisse, cette tendance est encore plus marquée : les habitants volent en moyenne 1,6 fois par an, ce qui est deux à trois fois plus que leurs voisins européens. Cette situation est d’autant plus préoccupante que les études montrent une corrélation forte entre les revenus et la propension à prendre l’avion. En effet, les ménages ayant des revenus supérieurs à 12 000 francs par mois prennent cinq fois plus de vols que ceux gagnant moins de 4 000 francs.

Ce constat a conduit Christophe Clivaz à déposerr une motion qui pourrait limiter les vols fréquents, tout en responsabilisant financièrement les plus grands pollueurs. La taxe progressive qu’il propose s’appliquerait sur les billets d’avion, en augmentant avec chaque vol supplémentaire effectué dans l’année. Le but est de décourager les voyages excessifs, tout en préservant ceux qui n’ont pas la possibilité de réduire leur nombre de déplacements en raison de contraintes professionnelles ou autres. La taxe serait modulée en fonction du nombre de vols effectués, mais aussi de la distance parcourue et de la classe de vol, afin de garantir que les personnes qui génèrent le plus d’émissions contribuent davantage.

Le premier vol annuel serait exempté de taxe, ce qui permettrait aux citoyens de voyager occasionnellement sans impact fiscal. Cependant, chaque vol supplémentaire augmenterait le montant de la taxe, concentrant ainsi l’effort fiscal sur ceux qui volent régulièrement, et donc génèrent des émissions disproportionnées. En somme, cette taxe vise à favoriser la transition vers des alternatives plus écologiques, tout en ne pénalisant pas les déplacements occasionnels, souvent nécessaires.

Réactions politiques : Soutiens et oppositions

La proposition de Clivaz a provoqué un large débat politique en Suisse, mettant en lumière des visions divergentes sur la manière de répondre à l’urgence climatique. Le Parti Socialiste (PS) a exprimé son soutien à la mesure, soulignant qu’il est nécessaire d’imposer une fiscalité plus stricte sur l’aviation, un secteur qui bénéficie aujourd’hui d’un traitement privilégié par rapport aux autres moyens de transport, rapporte 20minutes. Nadine Masshardt, vice-cheffe du groupe PS, va même plus loin en proposant également de taxer les vols courts lorsque des alternatives comme les trains de nuit ou les trains à grande vitesse existent. Selon elle, il est essentiel d’inciter les citoyens à changer de comportement, en rendant l’avion moins attractif d’un point de vue économique.

Du côté du Centre, la proposition est plus nuancée. Priska Wismer-Felder, représentante du parti, se dit globalement favorable à une telle mesure, mais soulève des inquiétudes quant à la mise en œuvre pratique de la taxe. En effet, il faudrait une surveillance constante pour savoir précisément qui vole, quand et où. Cette collecte de données pourrait poser des problèmes de protection de la vie privée des citoyens, un aspect qui doit être soigneusement pris en compte.

Les critiques les plus virulentes viennent cependant de la droite et des partis libéraux. Le conseiller national Christian Wasserfallen (PLR) qualifie cette taxe de « farfelue » et d’« ingérence de l’État dans les choix personnels des citoyens ». Il souligne une incohérence dans la proposition, soulignant qu’un citoyen suisse serait pénalisé pour ses déplacements fréquents, tandis qu’un voyageur étranger, par exemple un Américain en transit, ne paierait pas cette taxe. Cette situation serait inéquitable, selon lui, et injuste pour les citoyens suisses. Mike Egger (UDC), quant à lui, critique le caractère « autoritaire » de la mesure, la comparant à un système de surveillance où l’État dicte les comportements des citoyens, à l’image du régime chinois. En outre, ces partis jugent que la taxe pénaliserait surtout ceux qui dépendent de l’avion pour des raisons professionnelles, créant ainsi une discrimination entre les différentes catégories de voyageurs.

Les Vert’libéraux, bien que préoccupés par les enjeux environnementaux, s’opposent également à la mesure. Martin Bäumle, conseiller national du groupe, considère que cette taxe n’aurait pas l’effet incitatif espéré et risquerait d’entraîner une bureaucratie supplémentaire sans véritable impact. Il plaide plutôt pour un soutien accru aux carburants durables et à d’autres technologies qui pourraient réduire l’empreinte carbone du secteur aérien sans peser directement sur les consommateurs.

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