Certaines cliniques et services de télémédecine suisses délèguent des prestations médicales à l’étranger, où les coûts sont bien moindres, tout en facturant ces services aux tarifs suisses. Une stratégie controversée qui met en lumière les ambiguïtés juridiques et les tensions au sein du système de santé.
Le recours à l’externalisation médicale par des acteurs privés suisses soulève des interrogations sur la transparence des coûts et la légitimité des pratiques. Alors que le débat s’intensifie, le Conseil national envisage des modifications législatives qui pourraient légaliser de manière explicite certaines de ces pratiques. Une réforme qui divise.
La délocalisation médicale : une pratique légale mais contestée
En Suisse, des acteurs comme le groupe privé Hirslanden et le leader de la télémédecine Medgate font appel à des prestataires étrangers pour réduire leurs coûts. Par exemple, des analyses d’IRM ou des consultations en télémédecine sont réalisées en France, en Allemagne ou en Hongrie, avant d’être facturées aux patients suisses selon les barèmes locaux.
Cette pratique s’appuie sur un cadre légal qui autorise certaines prestations étrangères à être considérées comme fournies en Suisse. Cependant, cette flexibilité suscite la désapprobation de nombreuses parties prenantes, à commencer par Santésuisse, la faîtière des assureurs maladie. Selon Verena Nold, directrice de Santésuisse, ces prestations devraient être remboursées uniquement dans des cas exceptionnels, comme une urgence.
Le défi de la transparence pour les assureurs
La complexité de ces arrangements réside dans la difficulté à identifier l’origine des prestations médicales. Les factures remises aux assureurs mentionnent uniquement le nom de l’établissement ou du médecin en Suisse, sans indiquer si le service a été effectivement réalisé à l’étranger. Cette absence de traçabilité limite le contrôle des assureurs et alimente les critiques sur un système qui manquerait de transparence.
Pour les assureurs, ce flou complique la gestion des remboursements et pourrait conduire à une augmentation des coûts. Ils appellent à une meilleure régulation pour protéger les patients et éviter des abus dans un contexte où les dépenses de santé sont déjà élevées.
Une réforme législative en préparation
Face à ces controverses, le Conseil national a récemment approuvé un projet qui pourrait permettre un remboursement légal élargi des prestations réalisées à l’étranger. Cette proposition divise, car si elle clarifie les règles, elle pourrait aussi encourager davantage de délocalisations médicales, mettant en péril l’équilibre du système de santé suisse.
Dans ce contexte, la question centrale reste de savoir comment adapter la législation pour encadrer ces pratiques sans compromettre la qualité des soins et la transparence.