Pendant des années, la Chine a été le moteur principal de la croissance de la demande mondiale de pétrole. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), elle représentait à elle seule plus de 60 % de l’augmentation totale de cette demande au cours de la dernière décennie. Mais aujourd’hui, ce pays traverse un triple tournant : économique, démographique et technologique, affectant directement sa consommation énergétique.
Lorsque l’économie chinoise était en plein essor, son besoin insatiable de pétrole stimulait les prix mondiaux. Les usines, les chantiers de construction et une population de plus en plus prospère consommaient massivement des ressources énergétiques. Aujourd’hui, le ralentissement brutal de la demande chinoise perturbe cette dynamique et fait baisser les prix du pétrole, une tendance dont bénéficient les consommateurs suisses.
Une chute de la demande chinoise
En 2024, la demande chinoise de pétrole a enregistré une baisse notable. En juillet de cette année, elle était inférieure de 1,7 % à celle de l’année précédente. Alors que la demande avait augmenté de près de 10 % en 2023, elle ne devrait progresser que de 1 % selon les prévisions de l’AIE, un ralentissement qualifié d’« abrupt ».
Plusieurs facteurs expliquent cette évolution. D’abord, le pays traverse une crise démographique majeure. Depuis 2016, le taux de natalité a fortement chuté, entraînant une diminution de la population dès 2022, une première en 60 ans. Cet effondrement semble irréversible, malgré les efforts du gouvernement, qui encourage les naissances à travers des initiatives telles que des « cours d’amour » dans les universités ou des appels non sollicités aux femmes mariées pour discuter de leurs projets familiaux.
Ensuite, la crise immobilière chinoise affecte directement la demande de pétrole. Depuis 2021, les prix de l’immobilier ont chuté de 11 %, après des années de hausse constante. Les promoteurs peinent à vendre leurs biens et disposent de stocks d’habitations suffisants pour répondre à la demande des dix prochaines années. Par conséquent, moins de gazole est utilisé pour les chantiers de construction et le transport de matériaux.
Une transition énergétique rapide
Un autre tournant majeur concerne le secteur automobile. En juillet et août 2024, plus de la moitié des nouvelles voitures vendues en Chine étaient électriques. Ce passage rapide des véhicules à combustion aux véhicules électriques réduit considérablement la consommation de pétrole du pays.
Cette transformation est cruciale, car la Chine ne joue plus son rôle de pilier de la demande mondiale de pétrole. Selon l’AIE, cette baisse drastique de la consommation chinoise ne sera pas compensée par d’autres régions. Les pays occidentaux, dont la demande de pétrole est stable depuis une décennie, ne peuvent absorber cet excédent. De même, l’Inde et d’autres pays asiatiques n’ont pas encore la capacité industrielle nécessaire pour prendre le relais.
Un tournant historique pour les prix mondiaux
La baisse de la demande chinoise s’inscrit dans une tendance mondiale de ralentissement de la consommation pétrolière. L’AIE prévoit que cette demande pourrait atteindre un plateau d’ici la fin de la décennie.
Cette situation stabilise les prix, même en cas de crises ou de chocs sur la production. Une demande mondiale moins pressante atténue les variations brutales des cours du pétrole, ce qui se répercute favorablement sur les prix de l’essence en Suisse.