Le Conseil fédéral introduit une réforme permettant aux Suisses de combler leurs années sans cotisation dans le pilier 3a dès 2025. Cette mesure fiscale vise à renforcer la prévoyance individuelle, mais elle suscite des inquiétudes politiques et budgétaires.
La possibilité de rachats rétroactifs dans le pilier 3a, approuvée par le Conseil fédéral, permettra aux contribuables d’économiser pour la retraite tout en profitant d’une réduction d’impôt. Ce dispositif pourrait toutefois engendrer une perte de revenus pour les collectivités publiques, estimée à plusieurs centaines de millions de francs.
Une réforme pour compenser les années sans cotisations
À partir du 1ᵉʳ janvier 2025, les personnes actives en Suisse pourront racheter jusqu’à dix années de cotisations manquantes dans leur pilier 3a, ce qui leur permettra de réduire leur revenu imposable. Cette modification de l’ordonnance sur les déductions fiscales pour les cotisations au pilier 3a (OPP 3) répond à la motion 19.3702 déposée par le conseiller aux États Erich Ettlin et adoptée par les deux chambres fédérales.
Pour être éligible, le contribuable devra avoir été soumis à l’AVS (Assurance Vieillesse et Survivants) en Suisse pendant les années pour lesquelles il souhaite effectuer un rachat, ainsi que lors de l’année du versement. Les rachats seront autorisés à hauteur de la cotisation annuelle de 7258 francs en 2025, permettant une déduction fiscale totale de 14 516 francs en cumulant cotisation ordinaire et rachat.
Des pertes fiscales importantes et une opposition politique forte
Le Conseil fédéral estime que cette mesure pourrait entraîner une réduction des recettes fiscales à hauteur de 100 à 150 millions de francs pour l’impôt fédéral direct. La part de ces pertes pour les cantons est estimée à 21,2 millions, tandis que la Confédération supporterait une perte de 78,8 millions. Les impôts cantonaux et communaux sur le revenu pourraient, quant à eux, voir leurs recettes diminuer de 200 à 450 millions de francs par an.
Si cette mesure a été bien accueillie par une partie des milieux économiques et politiques, le Parti socialiste (PS) y voit un « cadeau fiscal » pour les plus aisés. Selon la co-présidente du PS, Mattea Meyer, cette nouvelle possibilité d’optimisation fiscale favorisera les contribuables les plus fortunés, tout en augmentant les charges administratives pour les autorités fiscales. Le PS critique également les pertes fiscales que cette réforme induira pour les cantons, les communes et la Confédération, en soulignant l’impact potentiel sur les budgets consacrés à l’AVS, aux crèches ou à la réduction des primes d’assurance maladie.
Vers une révision des retraits capital
Par ailleurs, le Conseil fédéral a aussi annoncé son intention de revoir l’imposition des retraits en capital du pilier 3a. En septembre 2024, il a mandaté un groupe d’experts pour étudier le système fiscal des piliers 2 et 3a, avec la possibilité de doubler, voire de quadrupler l’imposition des retraits pour les revenus moyens et élevés. Les détails de cette révision seront présentés fin janvier 2025, dans le cadre d’un projet de consultation plus large sur le financement des tâches fédérales.