Le Bade-Wurtemberg, avec ses 11 millions d’habitants, entretient des liens économiques très forts avec la Suisse, une relation difficile à dissocier en raison de la proximité géographique. La région partage plus de 300 kilomètres de frontière avec la Suisse, et chaque jour, près de 60’000 travailleurs frontaliers traversent cette frontière pour rejoindre leur poste en Suisse, ce qui témoigne de l’importance de cette coopération. En 2024, le Bade-Wurtemberg a exporté 20,2 milliards d’euros de marchandises vers la Suisse, tout en en important pour 18,7 milliards d’euros, faisant de la Suisse le deuxième partenaire commercial de la région, après la France.
Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que le gouvernement régional du Bade-Wurtemberg s’implique activement dans les discussions entre la Suisse et l’Union européenne. Le ministre-président du Bade-Wurtemberg, Winfried Kretschmann, a d’ailleurs affirmé fièrement avoir « construit des ponts entre Berne et Bruxelles », soulignant l’importance de maintenir des liens solides. Toutefois, ces liens sont aujourd’hui menacés par l’incertitude autour de l’accord entre l’UE et la Suisse, d’autant plus que le Bade-Wurtemberg reste le seul Land allemand à disposer d’une stratégie spécifique envers la Suisse, une stratégie désormais obsolète et datant de près de dix ans, rapporte Blick.
Une stratégie dépassée et une incertitude grandissante
Face à cette situation de blocage, des tensions apparaissent au sein des partis politiques allemands. La députée du Parti libéral-démocrate (FDP), Alena Fink-Trauschel, a récemment interpellé le gouvernement régional en ces termes : « Plus d’excuses ! ». Selon elle, les entreprises du Bade-Wurtemberg ont besoin de « conditions-cadres claires » et ne peuvent pas se contenter de discussions sans résultats concrets. Le fait que la stratégie vis-à-vis de la Suisse ne soit pas actualisée après une décennie soulève des inquiétudes, et l’opposition libérale réclame une prise de position rapide.
Les élus sont unanimes sur un point : l’UE ne doit pas être l’unique interlocuteur, et la Suisse doit également être prise en compte. La situation actuelle met en lumière une certaine faiblesse de la politique régionale, d’autant que de nombreuses zones juridiques restent floues. Selon le média helvétique, une conclusion rapide d’un nouvel accord avec la Suisse est d’autant plus cruciale, mais il est désormais clair que cela pourrait prendre des années.
Des projets de coopération menacés
Les projets de coopération entre la Suisse et le Bade-Wurtemberg ne se limitent pas aux échanges commerciaux. Plusieurs secteurs stratégiques sont en jeu, comme l’énergie, l’aéronautique, la santé, l’intelligence artificielle et, en particulier, le domaine de l’hydrogène. Le Bade-Wurtemberg et la Suisse envisagent ensemble la construction d’un pipeline d’hydrogène le long du Haut-Rhin, projet qui pourrait transformer la région de Bâle et Fribourg-en-Brisgau en un pôle énergétique majeur pour l’Europe. Cependant, le blocage des négociations entre la Suisse et l’UE met en péril ce type d’initiatives.
Les relations transfrontalières en matière de transports sont également affectées, comme en témoigne le retard dans l’électrification de la ligne du Haut-Rhin. Ces projets, vitaux pour renforcer les liens entre les deux régions, ne peuvent avancer tant que les discussions sur l’accord entre la Suisse et l’UE ne seront pas clarifiées. Les autorités locales de la région voient de fortes potentialités de coopération dans ces secteurs, mais sans un cadre juridique stable, ces projets risquent d’être freinés.
Enfin, la question de l’approvisionnement énergétique, en particulier à travers le projet de pipeline d’hydrogène, soulève des attentes de la part des élus et des entreprises locales. Ces projets sont perçus comme des leviers de développement économique, mais tant que l’accord entre la Suisse et l’UE n’est pas conclu, ces initiatives risquent d’être reportées.