La taxe OCDE, qui devait permettre à la Suisse de collecter jusqu’à 2,5 milliards de francs supplémentaires, s’avère beaucoup moins lucrative que prévu. En réalité, l’apport des grandes entreprises se limitera à 243,2 millions de francs en 2024, soit seulement 8 % des prévisions les plus optimistes.
Une étude de Deloitte révèle l’ampleur de cette déception, alors que l’impôt minimum de l’OCDE avait pour objectif d’éviter que les multinationales n’échappent à leur devoir fiscal en transférant leurs bénéfices dans des paradis fiscaux, rapporte Watson.
Une réforme qui peine à tenir ses promesses
L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a lancé en 2021 une réforme fiscale visant à garantir qu’aucune grande entreprise internationale ne paye moins de 15 % d’impôt sur ses bénéfices dans aucun pays où elle opère. Cette initiative devait générer des recettes fiscales substantielles, estimées entre 1 et 2,5 milliards de francs par an pour la Suisse.
Pourtant, selon une analyse de Deloitte, les résultats sont loin de ces attentes. L’étude révèle que, en 2024, les recettes fiscales supplémentaires se chiffreront à seulement 243,2 millions de francs. Ce montant représente moins de 10 % des prévisions les plus optimistes. Ce constat soulève la question de l’efficacité réelle de la réforme et de l’impact qu’elle pourrait avoir sur les finances publiques suisses.
Une contribution très inégale des grandes entreprises
L’étude de Deloitte a scruté les 50 plus grandes entreprises présentes en Suisse, regroupées dans les indices boursiers SMI et SMIM. Parmi elles, seules 15 sont actuellement concernées par cette réforme. Celles-ci devront s’acquitter d’impôts supplémentaires en raison de la nouvelle taxe minimale.
Le groupe Roche, leader mondial dans le secteur pharmaceutique, est de loin le plus gros contributeur avec 189 millions de francs d’impôts supplémentaires, représentant plus des deux tiers du total des recettes fiscales supplémentaires pour 2024.
D’autres entreprises, comme Partners Group et Straumann, ajoutent quelques millions de francs, tandis que des sociétés telles que Swiss Life ou Swisscom contribuent à hauteur de montants bien plus modestes. Au total, les 15 entreprises concernées génèrent environ 243,2 millions de francs d’impôts supplémentaires.
Une répartition inégale qui montre que la réforme touche de manière disproportionnée certains secteurs, principalement la pharmacie, la finance et les technologies médicales, tandis que d’autres secteurs restent largement épargnés.
Une réforme encore en phase transitoire
L’écart entre les prévisions et les résultats actuels s’explique par le fait que les nouvelles règles fiscales sont encore dans une phase transitoire qui court jusqu’à fin 2026. Cette période de transition permet à certaines entreprises, sous certaines conditions, de ne pas encore verser les impôts supplémentaires.
Selon l’étude de Deloitte, la faible participation des entreprises et les recettes fiscales encore limitées peuvent être attribuées à ce statut transitoire. La réforme sera véritablement appliquée à partir de 2027, lorsque la plupart des entreprises devront respecter pleinement les nouvelles règles de l’OCDE.
En attendant, la Suisse a décidé de mettre en place un impôt complémentaire national à partir de 2024 pour compenser la lente adoption de l’impôt minimum de l’OCDE. Ce système national devrait également inclure, à partir de 2025, des prélèvements fiscaux supplémentaires sur les filiales étrangères des groupes suisses, à condition que ces filiales ne respectent pas le taux minimum de 15 % d’impôts sur leurs bénéfices dans les pays où elles sont implantées.
Toutefois, comme le souligne Thomas Hug, expert fiscal chez Deloitte, l’ampleur des recettes fiscales supplémentaires après 2026 dépendra largement des décisions prises par d’autres pays participants à la réforme, notamment les États-Unis, qui n’ont pas encore pleinement soutenu cette initiative.