Dernier exercice périlleux pour Viola Amherd avant son départ du gouvernement, cette annonce intervient alors que son département fait face à plusieurs turbulences. Entre des soupçons de fraude chez Ruag et les démissions des chefs de l’armée et du renseignement, la ministre a dû défendre un budget en forte hausse, adopté au détriment d’autres postes comme la coopération internationale.
L’objectif affiché par le Parlement est d’atteindre une dépense militaire équivalente à 1 % du PIB d’ici 2032. Cette augmentation s’inscrit dans un effort de modernisation et de renforcement des capacités défensives de l’armée suisse. Toutefois, ce choix budgétaire ne fait pas l’unanimité et soulève des oppositions, notamment de la part des partis de gauche qui dénoncent un gaspillage de fonds publics.
Un programme d’armement au cœur du budget
Le programme d’armement représente la plus grande part du budget militaire avec un investissement de 1,51 milliard de francs. Parmi les acquisitions prévues, le remplacement de l’obusier blindé M-109 par un système d’artillerie à roues occupe une place centrale. Le Conseil fédéral a validé l’achat de 32 unités du modèle Artillery Gun Module de l’entreprise allemande KNDS, pour un montant de 850 millions de francs, incluant les moyens logistiques, les munitions d’instruction et d’engagement ainsi que les simulateurs.
En complément, 255 millions de francs seront alloués à la remise en état des chars Leopard 2, et 35 millions supplémentaires seront consacrés au maintien de la valeur du char de dépannage 01. Selon RTS, Viola Amherd a insisté sur l’importance d’une défense équilibrée, affirmant que si un pays devait attaquer la Suisse, il le ferait par son point le plus vulnérable. Elle a ainsi justifié ces investissements en expliquant qu’un renforcement ciblé de certaines capacités au détriment d’autres affaiblirait l’ensemble du dispositif défensif.
Le gouvernement propose également de retirer du service les avions de combat F-5 Tiger d’ici 2027. Cette décision, déjà avancée par le passé, repose sur des considérations économiques et logistiques. Le maintien de trois flottes en parallèle serait trop coûteux et difficile à assurer avec les ressources humaines disponibles.
Toutefois, cette mesure suscite des débats, car ces appareils sont actuellement utilisés par la Patrouille Suisse, l’escadrille de voltige aérienne nationale. Face aux critiques du Parlement, le Département fédéral de la défense examine la possibilité d’utiliser un autre type d’appareil, moins onéreux et plus écologique, pour assurer la continuité des démonstrations aériennes.
Des investissements dans les technologies et la cybersécurité
Outre l’acquisition de nouveaux équipements militaires lourds, une partie du budget sera consacrée à l’amélioration des infrastructures numériques et des systèmes de communication des troupes. Quatre projets liés aux technologies de l’information et de la communication sont prévus, avec un crédit de 110 millions de francs pour moderniser les infrastructures informatiques.
Par ailleurs, 72 millions de francs seront investis dans le développement de logiciels permettant une transmission rapide et sécurisée des données entre unités militaires. L’armée prévoit aussi d’acheter des radars passifs pour un montant de 80 millions de francs, et 30 millions seront dédiés à l’amélioration de la formation des opérateurs de mini-drones utilisés pour l’exploration tactique au sol. Selon Watson, ces investissements s’inscrivent dans une volonté de modernisation des capacités militaires suisses, notamment en matière de renseignement et de coordination opérationnelle.
Une contestation politique croissante
L’augmentation du budget militaire ne fait pas l’unanimité au sein de la classe politique. La gauche, en particulier le Parti socialiste suisse, critique ouvertement ces nouvelles dépenses qu’elle qualifie de « gaspillage d’argent ». Selon RTS, le PS appelle à un moratoire immédiat sur tout nouvel engagement financier au sein du Département fédéral de la défense, dénonçant une fuite en avant budgétaire alors que le département traverse une crise de gouvernance.
Les socialistes demandent également l’ouverture d’une commission d’enquête parlementaire sur les dysfonctionnements au sein de Ruag, l’entreprise d’armement impliquée dans des soupçons de fraude. De leur côté, les partis du Centre et de la droite défendent cette hausse du budget militaire en arguant que le contexte international exige un renforcement des capacités défensives de la Suisse.
Malgré les controverses, le gouvernement maintient sa ligne et justifie ces investissements par la nécessité d’adapter l’armée aux défis contemporains. La question reste toutefois de savoir si ces choix budgétaires permettront réellement de restaurer la confiance dans la défense nationale ou s’ils alimenteront encore davantage les tensions politiques autour de la gestion du Département fédéral de la défense.