D’après la dernière étude menée par Swisscanto, la santé des caisses de pension suisses est globalement robuste. En 2024, le taux de couverture des caisses de pension atteint en moyenne 117 %, un chiffre impressionnant qui révèle que les réserves des caisses dépassent les obligations envers les retraités.
Parallèlement, les rendements des placements ont atteint un niveau record, avec une rémunération des avoirs de vieillesse de 4,3 %, un chiffre jamais observé depuis 2021. En effet, les placements jouent un rôle de plus en plus central dans la constitution de la fortune des assurés, le « troisième cotisant » représentant désormais 38 % des recettes totales, rapporte Watson.
Ces bons résultats sont d’autant plus remarquables que le taux de couverture a atteint son deuxième plus haut niveau en 25 ans, ce qui témoigne de la solidité financière de l’ensemble des caisses de pension.
Des écarts de rendement significatifs
Cependant, tous les assurés ne bénéficient pas de ces bons résultats financiers. En effet, une grande disparité existe entre les caisses de pension. Les 10% de caisses les moins rémunérées n’ont versé qu’une moyenne de 1,75 % aux assurés, un chiffre à peine supérieur au taux d’intérêt minimal de 1,25 %.
À l’opposé, les 10% des caisses les plus performantes ont distribué des rendements moyens de 8,25%. Cette différence de performance ne dépend pas seulement de la taille de la caisse ou de sa capacité à prendre des risques.
Selon Iwan Deplazes, responsable de la gestion des actifs à la banque cantonale de Zurich, l’ambition des caisses, notamment leurs objectifs de rendements théoriques, joue un rôle déterminant dans ces résultats. De plus, le savoir-faire au sein du conseil de fondation peut également influer sur ces performances.
Les différences entre secteurs sont également notables. Les caisses de pension issues de l’industrie financière et manufacturière affichent des rendements bien plus élevés que celles du commerce, de la santé ou de la construction. Quant aux caisses de pension publiques, elles sont en queue de peloton, avec des rendements nettement plus bas.
La montée des retraits en capital
Une tendance inquiétante se dessine parmi les nouveaux retraités suisses : de plus en plus préfèrent retirer leur capital de prévoyance plutôt que d’opter pour une rente à vie. Selon les experts de la Banque cantonale de Zurich, bien que certains retraités bénéficient encore de taux de conversion élevés, ils choisissent souvent de retirer l’intégralité de leur capital.
Par exemple, un retraité avec un capital de 100 000 francs choisirait un retrait en capital, plutôt qu’une rente annuelle de 7 000 francs. Cette pratique, bien que croissante, pourrait nuire à la stabilité financière des retraités à long terme, en particulier en cas de longévité élevée. L’étude de Swisscanto mentionne cette évolution sans en préciser les causes, mais elle met en lumière le fait que cette tendance se renforce depuis des années. Les retraités sous-estiment parfois la longévité, et ne prennent pas en compte les risques financiers à long terme qu’ils encourent.
L’étude souligne également que, parmi ceux qui retirent leur capital, le pourcentage de ceux qui choisissent de prendre un capital uniquement est en constante augmentation. Cette pratique pourrait, selon les experts, exposer les retraités à des difficultés économiques futures si leur capital vient à s’épuiser plus tôt que prévu.
Une réforme avortée, des inégalités persistantes
Une autre dimension importante de l’analyse porte sur l’échec de la réforme des caisses de pension, qui visait à ajuster les taux de conversion pour les assurés obligatoires. En raison de l’allongement de l’espérance de vie, le Parlement suisse souhaitait réduire le taux de conversion de 6,8 % à 6 %, tout en stabilisant les rentes par des subventions au capital vieillesse.
Toutefois, parmi les caisses de pension comptant de nombreux assurés obligatoires, seules 20 % ont envisagé des mesures pour maintenir l’équilibre, comme l’augmentation des cotisations des employeurs. Cela montre que la réforme n’a pas réussi à trouver un compromis satisfaisant pour assurer une meilleure pérennité du système.
L’une des conséquences de cette situation est que les personnes travaillant à temps partiel ou ayant de faibles revenus se voient souvent exclues des épargnes privilégiées du système de prévoyance. Cette exclusion peut créer de profondes inégalités au sein même du système de prévoyance suisse, où les différences de rendement et d’accès à l’épargne se creusent entre les catégories de travailleurs.








