Le coût des soins de santé à Genève ne cesse d’augmenter, et un nombre croissant de citoyens renonce à consulter en raison de cette pression financière. Une étude des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) révèle que, face à l’augmentation des primes d’assurance maladie, une proportion importante de la population se voit contrainte de faire l’impasse sur des soins nécessaires.
Ce phénomène, bien que déjà préoccupant, pourrait s’aggraver dans les années à venir. L’impact de cette situation dépasse la simple question de la santé individuelle, touchant également les dynamiques sociales et économiques du canton.
Le renoncement aux soins : une tendance inquiétante
Depuis 2011, les Hôpitaux universitaires de Genève mènent une étude sur le renoncement aux soins pour des raisons financières. Les résultats relatés par la RTS montrent une tendance préoccupante : aujourd’hui, un Genevois sur quatre admet renoncer à se soigner à cause des coûts, contre un sur sept en 2011. Ce phénomène s’intensifie en parallèle avec la hausse des primes d’assurance maladie, lesquelles continuent d’augmenter chaque année. En 2023, par exemple, la prime mensuelle moyenne a atteint 586 francs, soit la plus élevée du pays, un fardeau qui pousse de plus en plus de citoyens à sacrifier des soins pourtant nécessaires.
Les soins les plus souvent reportés sont ceux qui concernent le médecin traitant et le dentiste. Le coût des consultations dentaires, souvent non couvertes par l’assurance de base, constitue une part importante des renoncements. Les chercheurs des HUG ont observé qu’à chaque augmentation de 10 francs des primes, le taux de renoncement aux soins augmente de 2,1%. Si cette tendance se poursuit, le nombre de Genevois renonçant à des soins pourrait doubler d’ici à 2030. Cette situation alarme les experts, qui y voient un risque pour la santé publique, d’autant plus que ces renoncements peuvent entraîner des complications médicales plus graves et coûteuses à traiter à long terme.
La situation touche particulièrement les classes socio-économiques moyennes et supérieures. En 2011, seulement 4% des personnes dans ces catégories renonçaient aux soins. Aujourd’hui, ce chiffre a grimpé à 14%, un signe inquiétant d’un phénomène qui touche désormais une population plus large. La hausse des primes, couplée à une couverture de soins de santé souvent insuffisante pour des traitements non urgents, exacerbe cette problématique.
Les réponses politiques face à un défi majeur
Le phénomène du renoncement aux soins soulève des questions profondes concernant l’efficacité du système de santé à Genève. Pierre Maudet, conseiller d’État en charge de la Santé, a qualifié cette situation de « véritable défi politique ». Face à cette problématique, les solutions immédiates semblent limitées. Les réformes proposées visent principalement à réorganiser l’ensemble du système de santé pour le rendre plus accessible et moins coûteux. L’une des propositions les plus discutées est l’instauration d’une caisse publique cantonale d’assurance santé, couplée à un réseau de soins intégrés.
L’objectif serait de rationaliser les coûts en réduisant les doublons dans les prestations médicales et en revoyant le modèle économique actuel. Actuellement, les prestataires de soins sont rémunérés en fonction du volume des actes médicaux, ce qui peut conduire à une multiplication de prestations inutiles, telles que des examens d’IRM redondants. Pour Pierre Maudet, il s’agit de repenser un modèle plus centré sur la prévention et la gestion à long terme de la santé des patients, afin de limiter leur recours à des soins coûteux.
Cependant, cette réforme n’est pas sans défis. La mise en place d’une caisse publique cantonale nécessite une large adhésion des différents acteurs politiques et économiques du canton. De plus, la question de la responsabilité individuelle face aux dépenses de santé demeure un sujet sensible, notamment parmi les assurés privés et les professionnels du secteur. La transition vers un tel système, bien qu’ambitieuse, pourrait constituer une solution à long terme pour réduire le renoncement aux soins, mais elle devra surmonter de nombreux obstacles pour être effective.








