La profession de chauffeur de poids lourds en Suisse est en crise. D’ici à 2032, selon une étude de l’Université de Saint-Gall, 80 000 postes pourraient manquer dans ce secteur clé de l’économie.
Ce phénomène touche non seulement la logistique, mais aussi la circulation des marchandises à travers tout le pays. En dépit des tentatives pour attirer de nouveaux talents, la profession peine à séduire en raison de conditions de travail difficiles, d’un salaire modeste et d’une concurrence internationale accrue.
Un secteur en manque de relève
La pénurie de chauffeurs poids lourds en Suisse est avant tout liée à l’absence de relève pour remplacer une génération vieillissante. Actuellement, la moyenne d’âge des chauffeurs est supérieure à 50 ans et de nombreux professionnels sont proches de la retraite. Selon Robert Küderli, directeur du centre de formation Inside-formations, cela fait dix ans que l’on tire la sonnette d’alarme sur la question de la relève, mais les réponses apportées sont encore insuffisantes, a relaté RTS.ch. Le manque de jeunes dans ce métier se fait sentir particulièrement depuis les dernières années.
Le problème dépasse les frontières suisses. En effet, selon une étude de l’Université de Saint-Gall, il est estimé qu’il manquera jusqu’à 80 000 chauffeurs dans les secteurs du transport de marchandises en Suisse d’ici à 2032. Mais cette pénurie n’est pas propre à la Suisse ; elle touche toute l’Europe. Les solutions envisagées jusque-là, comme le recrutement de chauffeurs étrangers, montrent rapidement leurs limites. Dans de nombreux pays européens, le manque de main-d’œuvre est également criant. L’Association suisse des transports routiers (ASTAG) tente de répondre à cette crise en organisant des salons de métiers, comme les Swissskills, mais ces initiatives ne suffisent pas à combler le vide.
Un autre facteur expliquant cette pénurie est le manque d’attractivité du métier. En Suisse, les salaires sont souvent jugés insuffisants par rapport aux exigences du travail. Un chauffeur poids lourds gagne en moyenne 4700 francs par mois, un salaire qui semble bien peu pour un métier exigeant. À cela s’ajoutent des conditions de travail difficiles, notamment des horaires irréguliers, la circulation dans les grandes métropoles et les longs trajets. Par ailleurs, le coût pour obtenir un permis de conduire poids lourds est élevé : environ 15 000 francs, un montant que certains employeurs, comme la commune de Prilly, prennent en charge. Malgré cela, nombreux sont les Suisses qui hésitent à se lancer dans cette voie.
Les pistes pour résoudre la crise
Face à ce manque de main-d’œuvre, plusieurs pistes sont explorées. Tout d’abord, il y a la formation. Les entreprises et les associations professionnelles tentent de faire découvrir ce métier aux jeunes en organisant des événements comme les Swissskills. Le but est de créer une véritable passerelle entre les jeunes et les entreprises formatrices. Toutefois, comme le souligne Paolo Naselli, vice-président de l’ASTAG, ces initiatives restent insuffisantes pour répondre à la demande croissante.
L’automatisation du transport est également envisagée comme une solution à long terme. Bien que les camions autonomes ne soient pas encore totalement fonctionnels, des tests sont en cours. Ils pourraient offrir une alternative aux chauffeurs humains à l’avenir, mais ces technologies sont encore loin d’être opérationnelles à grande échelle.
Les améliorations des conditions de travail sont également au cœur des discussions. Des voix s’élèvent pour réclamer une révision des horaires de travail, des salaires plus attractifs et des espaces de repos plus adaptés pour les chauffeurs. Ces mesures visent à rendre la profession plus attractive pour les jeunes générations.
En parallèle, des initiatives pour faciliter l’embauche de chauffeurs étrangers sont également en réflexion. Avec l’intégration de chauffeurs venant de l’UE ou d’autres pays, les entreprises pourraient réduire l’impact de la pénurie, tout en répondant à des besoins immédiats.