L’explosion des loyers freine les déménagements, forçant de nombreux locataires à rester dans des logements qui ne correspondent plus à leurs besoins ou à leur budget.
Les Suisses, souvent contraints de rester dans leur logement actuel, subissent les effets d’un marché locatif tendu. Dans certaines régions, le manque de logements disponibles et la hausse des loyers poussent les résidents à s’installer dans des villes plus petites ou à allonger leur trajet domicile-travail.
Des déménagements limités par la hausse des loyers
Le marché locatif suisse traverse une période de pénurie. Avec des loyers en forte hausse pour les nouveaux contrats, beaucoup de locataires se voient contraints de rester dans leur logement actuel. Les chiffres de la Poste suisse montrent une baisse notable des déménagements, à savoir en 2020, environ 451 884 ménages ont changé de domicile, contre seulement 404 868 l’année dernière. Cette tendance est particulièrement marquée dans les régions où les loyers sont les plus élevés, comme Genève, Lausanne et Zurich.
À Genève, par exemple, un ménage reste en moyenne 14,4 ans dans le même logement, un record national. La durée moyenne de séjour au niveau national est de 8,5 ans, illustrant une sédentarisation croissante des locataires. Cette situation est renforcée par une législation qui protège les loyers existants, ne permettant leur augmentation qu’en cas de hausse du taux de référence.
Les conséquences d’une mobilité retreinte
Pour de nombreux locataires, quitter leur logement actuel signifierait payer un loyer supérieur pour un appartement plus petit. Ce phénomène touche surtout les familles dont les enfants ont quitté le domicile, mais aussi les personnes récemment séparées, qui peinent à trouver un logement abordable. En Suisse, 28 % des ménages devraient consacrer plus d’un tiers de leur revenu brut pour un logement comparable en cas de déménagement, un chiffre qui grimpe dans les cantons de Genève, Zoug, Zurich et Vaud.
En outre, cette limitation de la mobilité pourrait poser des problèmes pour l’économie suisse. Si les travailleurs deviennent moins mobiles, cela pourrait rendre plus difficile la recherche de main-d’œuvre qualifiée, notamment dans les emplois où le télétravail n’est pas possible. Le marché locatif pourrait également affecter l’attractivité de la Suisse pour les travailleurs étrangers, pour qui le coût du logement pourrait devenir un frein.
Une tendance à l’exode vers les villes moyennes
Face à la pression locative, de plus en plus de Suisses choisissent de s’installer dans des centres de petite et moyenne taille. La flexibilité du télétravail a aussi encouragé cette tendance. En effet, les travailleurs qui ne se rendent au bureau que quelques jours par semaine acceptent plus facilement de longs trajets pour obtenir un logement plus spacieux et abordable. Ces déménagements vers les zones périphériques ont augmenté de près de 10 % ces dernières années.
Les jeunes adultes et les familles sont particulièrement concernés par cette migration. Selon les données, le taux de mobilité pour la tranche d’âge 18-25 ans a crû de 12,3 % depuis 2014, avec une augmentation notable également pour les 26-35 ans de 9,2 %. Cette tendance pourrait se renforcer si les loyers continuent d’augmenter dans les grandes villes.
Si certains déménagements sont inévitables, comme en cas d’agrandissement de la famille, les coûts excessifs liés à un changement de logement dissuadent les locataires de bouger. Les déménagements sont devenus rares, même lorsque le logement ne correspond plus aux besoins de ses occupants. Ce phénomène, bien que particulièrement frappant en Suisse romande, s’observe dans tout le pays. Avec un marché locatif difficile, l’avenir de la mobilité résidentielle en Suisse reste incertain, alors même que la demande en logements abordables ne cesse de croître.