L’initiative populaire des Jeunes socialistes propose un impôt de 50 % sur les successions dépassant 50 millions de francs. Cette mesure, destinée à renforcer la redistribution fiscale, suscite une forte opposition parmi les entreprises familiales suisses, qui y voient une menace directe à leur survie économique.
Selon un sondage de l’association industrielle Swissmem, publié dans la « NZZ am Sonntag », 33 % des entreprises membres se sentent concernées par cette initiative, et près de la moitié d’entre elles étudient déjà la possibilité de quitter le pays. Martin Hirzel, président de Swissmem, souligne que ce phénomène illustre « à quel point l’incertitude est grande » pour ces sociétés.
Des conséquences économiques potentiellement lourdes
Certaines grandes entreprises familiales, comme Bobst, fournisseur mondial d’équipements basé à Mex (VD), tirent la sonnette d’alarme. Jean-Pascal Bobst, président du comité, estime que cette initiative « prend en otage les entreprises et les familles ». Il juge qu’un départ de la Suisse pourrait devenir inévitable, faute de solutions viables pour s’acquitter de cet impôt successoral.
Les initiants avancent que les entreprises pourraient recourir à des crédits bancaires pour payer l’impôt. Une solution balayée par Martin Hirzel, qui considère que cette approche n’est pas réaliste, car les marges faibles de nombreuses entreprises industrielles ne permettraient pas d’obtenir de garanties suffisantes auprès des banques. Selon lui, cela conduirait à un démantèlement et une revente de certaines sociétés.
Une analyse du professeur d’économie Marius Brülhart indique que si l’initiative était adoptée, 77 à 93 % des fortunes concernées quitteraient la Suisse. En conséquence, les impôts sur le revenu et la fortune diminueraient fortement, et la réforme pourrait finalement causer un manque à gagner pour les budgets publics.
Une anticipation du départ face à une incertitude juridique
L’initiative prévoit également que les autorités mettent en place des mesures contre l’évasion fiscale, notamment en imposant rétroactivement les contribuables qui quitteraient la Suisse. Une hypothèse qui alarme de nombreuses entreprises, d’après la « NZZ am Sonntag ». Bien que le Conseil fédéral ait affirmé en décembre 2024 que cette taxation rétroactive serait juridiquement exclue, la méfiance persiste.
Face à ces incertitudes, certaines entreprises prennent les devants. Selon Norbert Kühnis, responsable des entreprises familiales chez PwC Suisse, plusieurs entrepreneurs préfèrent anticiper un transfert de domicile à l’étranger. Philipp Heer, directeur de VZ VermögensZentrum, indique que son cabinet a reçu plus de cent demandes sur cette question. Par ailleurs, un mouvement de transmission précoce des parts aux générations suivantes est déjà observé.