Le phénomène de l’augmentation des loyers et de la rareté des logements ne concerne pas uniquement la Suisse. En Europe, plusieurs pays sont également confrontés à cette crise immobilière qui a commencé bien avant la pandémie.
The Economist rapporte que les loyers dans les pays industrialisés augmentaient auparavant d’environ 2% par an. Mais depuis 2020, cette hausse a franchi un nouveau seuil, avec des augmentations de 5% par an, un rythme jamais observé depuis des décennies.
Ce constat s’applique aussi bien à la Suisse, où les loyers ont augmenté de 10,6% en deux ans, qu’à d’autres pays européens comme l’Irlande ou le Luxembourg, où la situation est particulièrement tendue.
En Suisse, l’essor des prix de l’immobilier dépasse largement la croissance des salaires, avec une différence de 26% entre l’augmentation des prix et celle des revenus sur la dernière décennie. Cela rend l’accession à la propriété de plus en plus difficile, en particulier pour la classe moyenne.
La construction en berne : un ralentissement inquiétant
Le secteur de la construction en Suisse connaît un ralentissement sans précédent, avec une baisse de 27 % du nombre de permis de construire ces cinq dernières années. Ce phénomène, observé dans d’autres pays européens comme la Suède, la Finlande ou l’Autriche, a des conséquences directes sur le marché du logement.
En 2023, le nombre de permis de construire était inférieur à celui de 2018, selon les chiffres rapportés par Wüest Partner. Ce déclin est dû à plusieurs facteurs, dont l’augmentation des coûts de construction, les hausses des taux d’intérêt et la résistance politique locale à de nouveaux projets immobiliers.
En Suisse, cette résistance est particulièrement forte, notamment en raison des réglementations environnementales et des oppositions à la densification des villes. Ce phénomène est connu sous le nom de « Not in my backyard » (NIMBY), où les habitants se plaignent du manque de logements, mais s’opposent à la construction de nouveaux projets dans leur voisinage.
Des conséquences sociales majeures
La crise du logement en Suisse n’a pas seulement un impact économique, elle génère également des conséquences sociales significatives. Face à l’augmentation des loyers et à la rareté des logements, de nombreux jeunes adultes restent vivre chez leurs parents plus longtemps, et les familles s’éloignent des centres-villes pour s’installer dans des zones périphériques, moins chères.
Cette dynamique a été observée à Zurich, où les loyers dans les zones périurbaines peuvent être jusqu’à 38 % moins chers qu’en centre-ville, d’après les informations fournies par UBS. Cette tendance souligne une fracture croissante entre les zones urbaines et rurales, exacerbé par les prix de l’immobilier qui ne cessent d’augmenter.
D’autre part, la crise immobilière crée une inégalité accrue, notamment pour ceux qui n’ont pas pu acheter leur logement à temps. Les personnes qui sont devenues propriétaires avant l’augmentation des prix bénéficient d’un patrimoine qui prend de la valeur, tandis que ceux qui cherchent à acheter aujourd’hui se retrouvent face à des prix inaccessibles.
Cela provoque un sentiment d’injustice, un sentiment que les loyers de plus en plus élevés peuvent entraîner des bouleversements sociaux. Une étude récemment publiée par l’Université d’Oxford mentionne qu’en Allemagne, l’augmentation des loyers a exacerbé les tensions sociales, en particulier pour les ménages à faible revenu, ce qui a renforcé le soutien à des partis politiques plus radicaux.








