Cet hiver, les États européens et la Suisse ont été contraints d’exploiter massivement leurs réserves de gaz pour faire face aux besoins de chauffage et à une consommation accrue dans le secteur de l’électricité. Cette tendance s’explique en grande partie par des températures plus basses qu’en 2024, qui ont intensifié la demande énergétique.
Au-delà des conditions météorologiques, un recours accru au gaz naturel pour la production d’électricité a également pesé sur les stocks. La faible production des énergies renouvelables en novembre et décembre, due à une couverture nuageuse importante et à un manque de vent, a obligé les pays européens à compenser avec des centrales à gaz.
Un niveau de stockage en forte baisse après un hiver difficile
En raison de la rigueur hivernale, les réserves de gaz en Europe ont chuté plus rapidement que prévu. En moyenne, les stocks européens affichent un taux de 63%, bien en dessous des 78% enregistrés à la même période l’an dernier.
Selon Gilles Verdan, directeur général de Gaznat, cette baisse s’explique par une combinaison de facteurs climatiques et énergétiques. « La production électrique à partir du gaz a été sollicitée en novembre et en décembre au niveau européen pour faire face au manque de production d’énergie électrique renouvelable », précise-t-il. L’absence de vent et une forte couverture nuageuse ont limité la production éolienne et solaire, forçant l’Europe à se tourner vers des centrales fonctionnant au gaz naturel pour éviter des pénuries d’électricité.
Une dépendance énergétique qui fragilise la Suisse
La Suisse, qui ne dispose pas de stockage de gaz sur son territoire, est entièrement dépendante de ses voisins européens pour son approvisionnement. Cette situation la rend vulnérable aux variations du marché énergétique et aux décisions prises à l’échelle européenne.
Si la baisse des réserves se poursuit, la Suisse pourrait être confrontée à des difficultés d’importation, notamment en cas de tensions entre pays européens sur la répartition des volumes disponibles. Pour le moment, le niveau des stocks reste suffisant, mais la situation impose une vigilance accrue jusqu’à la fin de la saison froide.
Des réserves suffisantes mais un défi pour le prochain hiver
Malgré le recul des stocks, les experts jugent que l’Europe ne devrait pas connaître de pénurie immédiate. Thierry Bros, professeur à Sciences Po et spécialiste en énergie et climat, estime que l’Europe terminera l’hiver avec un niveau de stockage supérieur à 25 %. « On a donc un peu de réserve. On était proche de niveaux records, on est revenu à des niveaux moyens », explique-t-il.
Toutefois, il souligne que deux facteurs pourraient remettre en question cette prévision : une vague de froid tardive ou de nouvelles perturbations d’approvisionnement. Dans ce cas, les stocks risqueraient d’atteindre des niveaux trop bas, obligeant l’Europe à augmenter ses importations de gaz naturel liquéfié (GNL) pour respecter les exigences de Bruxelles, qui impose un remplissage minimum de 90% avant le prochain hiver.
Si les niveaux de stockage restent sous contrôle, les événements des derniers mois rappellent la nécessité d’une gestion énergétique prudente, particulièrement pour un pays comme la Suisse, dépendant des infrastructures de stockage de ses voisins.