Le respect des salaires minimums cantonaux en Suisse romande soulève des inquiétudes croissantes. Bien que les législations sur les salaires minimums aient été mises en place dans plusieurs cantons, nombreux sont les travailleurs qui continuent de percevoir des rémunérations inférieures à ce qui est légalement fixé.
Ce phénomène est particulièrement visible à Genève et à Neuchâtel, où les infractions sont fréquentes, notamment dans des secteurs déjà fragilisés économiquement comme la restauration et les services.
Genève : une mise en conformité difficile
À Genève, les infractions au salaire minimum sont fréquentes dans des secteurs comme l’hôtellerie et la restauration. Selon l’Office cantonal de l’inspection et des relations du travail (OCIRT), le salaire minimum actuel dans le canton est de 24,48 francs de l’heure.
Pourtant, des employés comme Julio, serveur dans un bar des Eaux-Vives, sont rémunérés en dessous de ce seuil, à seulement 22 francs de l’heure, sans compensation pour les heures supplémentaires ou les jours fériés. Cette situation est révélatrice de l’ampleur du problème, d’autant plus que l’OCIRT relève également des cas de stages abusifs et d’autres pratiques illégales pour contourner les règles, rapporte 24 heures.
Les sanctions en cas d’infraction à la loi sont lourdes à Genève, avec des amendes pouvant atteindre jusqu’à 30’000 francs en cas de récidive. Malgré cela, certains employeurs préfèrent payer l’amende plutôt que de régulariser la situation. L’Office note aussi un certain nombre de contestations de décisions de l’inspection, notamment devant le Tribunal fédéral, ce qui démontre la résistance de certains acteurs économiques face aux contrôles.
Neuchâtel : une vigilance croissante
Le canton de Neuchâtel a été l’un des premiers à adopter un salaire minimum en Suisse, dès 2017. En 2024, plus de 20% des employeurs contrôlés ne respectaient toujours pas les normes en vigueur. Parmi ces infractions, une part importante provient du secteur de la restauration et de l’hébergement.
Environ 12% des violations concernent ce domaine, bien que des contrôles réguliers et des remises en conformité soient effectués par les autorités. L’Office des relations et des conditions de travail (ORCT) à Neuchâtel mène des actions de conciliation, ce qui a permis à certains employés de récupérer leurs salaires dus, à hauteur de 54’000 francs en 2024.
Malgré un taux de non-conformité relativement élevé, les autorités cantonales estiment que les mesures de contrôle, de remboursement et de sanctions sont suffisantes pour lutter contre les abus. Cependant, la complexité des calculs liés au salaire minimum et la méconnaissance des employeurs, notamment ceux n’étant pas affiliés à des associations professionnelles, expliqueraient en partie ces infractions.
Les secteurs les plus touchés par les abus salariaux
Les secteurs les plus concernés par les infractions aux salaires minimums sont la restauration, l’hôtellerie, ainsi que certains métiers liés aux services comme le nettoyage et la coiffure. Les données recueillies révèlent que la majorité des infractions proviennent de ces secteurs, qui sont souvent les plus vulnérables à la pression économique et à des marges bénéficiaires faibles.
En particulier, le secteur de la restauration à Genève, confronté à des coûts élevés (loyers, charges énergétiques), semble être celui où les employeurs sont les plus enclins à sous-payer leurs employés. Le restaurateur genevois Jean témoigne : « C’est une profession malmenée. Les loyers sont très chers et l’augmentation des coûts de l’électricité impacte toute la chaîne d’approvisionnement ».
Les employés dans ces secteurs subissent de plein fouet la situation économique difficile. Les témoignages d’employés comme Julio, qui cumule des emplois précaires, ou de Nolan, livreur payé en dessous du salaire minimum à Neuchâtel, illustrent des réalités souvent ignorées. Ces travailleurs, malgré leur conscience des abus, continuent d’accepter des rémunérations insuffisantes par nécessité.








