Lors de son premier mandat, Donald Trump avait déjà instauré des taxes sur l’acier et l’aluminium afin de protéger l’industrie sidérurgique américaine. Ces mesures avaient contribué à une instabilité du marché mondial de l’acier, en raison notamment de la surproduction chinoise et des restrictions imposées aux importations européennes. Cette stratégie avait poussé l’UE à instaurer des droits de douane supplémentaires pour se protéger, affectant ainsi les producteurs suisses.
Avec son retour au pouvoir, Donald Trump reprend la même approche, imposant des taxes de 25 % sans exception ni exemption. Cette décision, qui entrera en vigueur le 12 mars prochain, pourrait déclencher une nouvelle vague de représailles commerciales, notamment de la part de l’UE, principal partenaire économique de la Suisse.
Une industrie suisse directement peu concernée
En 2024, la Suisse a exporté 80 millions de francs de produits en acier et en aluminium vers les États-Unis, soit 0,8 % des 10 milliards de francs d’exportations totales vers ce pays (Blick). Cette faible proportion explique pourquoi les nouvelles taxes américaines n’affecteront que peu d’entreprises suisses dans l’immédiat.
Selon Blick, Jean-Philippe Kohl, vice-directeur de Swissmem, estime que ces mesures toucheront surtout les aciéries et les entreprises d’aluminium du Valais, ainsi que certaines fonderies. Chez Swiss Steel, on relativise également l’impact, expliquant que la plupart des produits en acier exportés vers les États-Unis sont des biens hautement spécialisés, pour lesquels il existe peu d’alternatives. Les clients américains pourraient donc accepter de payer des prix plus élevés pour ces produits.
Par ailleurs, toujours selon Blick, Swiss Steel Group précise que 10 % de son chiffre d’affaires total en 2023 provenait des États-Unis, mais qu’une partie importante de sa production destinée à ce marché est fabriquée directement dans son usine de Chicago, ce qui permet d’échapper aux taxes douanières.
Des conséquences indirectes pour l’économie suisse
Si la Suisse n’est pas la cible directe de ces nouvelles taxes, elle pourrait néanmoins subir les effets collatéraux d’une guerre commerciale entre les États-Unis et l’UE. Lors du premier mandat de Trump, l’UE avait renforcé ses droits de douane pour protéger son marché, ce qui avait pénalisé certains producteurs suisses.
En 2019, l’entreprise Stahl Gerlafingen, basée dans le canton de Soleure, avait dû fermer son aciérie et licencier 95 employés en raison des tensions commerciales et des restrictions imposées par l’UE (Blick). Ce type de scénario pourrait se reproduire si Bruxelles décidait de riposter aux nouvelles mesures américaines en renforçant ses propres barrières commerciales.
La Suisse cherche à préserver sa position
Grâce aux efforts du Secrétariat d’État à l’économie (SECO), la Suisse bénéficie depuis l’été dernier d’un statut privilégié auprès de l’UE, évitant ainsi certaines restrictions imposées aux pays tiers. Mais avec le retour de Donald Trump, cet équilibre pourrait être remis en question.
Jean-Philippe Kohl estime que la Suisse pourrait être fragilisée en cas d’escalade des tensions commerciales, rappelant que 15 % des exportations suisses sont destinées aux États-Unis et 55 % à l’UE. Dans ce contexte, le SECO devra négocier pour préserver un statut similaire à celui des pays de l’EEE, qui ne sont pas affectés par les hausses de droits de douane imposées par l’UE.
Si l’impact immédiat des taxes américaines reste limité pour la Suisse, leur effet sur l’économie mondiale et les relations commerciales internationales pourrait être bien plus important.