Faire une pause prolongée dans sa carrière sans que cela n’affecte sa sécurité financière à long terme, est-ce envisageable ? En Suisse, un projet de recherche ambitieux piloté par la Haute école de Lucerne explore justement cette possibilité. À travers un modèle de préfinancement des congés sabbatiques, des chercheurs souhaitent offrir aux travailleurs un moyen de prendre une pause tout en maintenant leur épargne retraite.
Ce projet, soutenu par des entreprises et des pouvoirs publics, pourrait bien révolutionner la manière dont les Suisses abordent leurs congés professionnels. Il représente une avancée importante pour ceux qui aspirent à un meilleur équilibre entre vie professionnelle et personnelle, sans risquer leur avenir financier.
Le préfinancement des congés sabbatiques : Une solution à la problématique des cotisations
Le congé sabbatique, bien qu’une opportunité pour de nombreux employés de se ressourcer, se heurte souvent à une barrière importante : la perte de cotisations sociales pendant cette période d’inactivité. Les cotisations au deuxième pilier, qui garantissent une partie des rentes de vieillesse, ne sont en général pas versées durant les congés sabbatiques. En conséquence, ceux qui prennent ce type de pause professionnelle risquent de se retrouver avec des lacunes dans leur prévoyance, impactant ainsi leur avenir financier, et notamment leur pension de vieillesse.
C’est ici qu’intervient le projet de préfinancement, porté par Yvonne Seiler Zimmermann, professeure et experte en prévoyance. L’objectif est de créer un modèle qui permettrait de financer un congé sabbatique sans que les cotisations sociales soient suspendues, selon Blick. Ce modèle propose une solution en permettant aux employés de financer leur congé via l’épargne de temps ou par des versements directs. L’originalité de ce projet réside dans le fait qu’il vise à intégrer ce préfinancement directement dans le système de prévoyance suisse existant, afin de garantir la sécurité des travailleurs tout en offrant une flexibilité nécessaire dans leur carrière.
Selon Yvonne Seiler Zimmermann, l’aspiration est d’élargir l’accès à ce modèle au-delà des seuls salariés à hauts revenus ou ceux dont l’employeur cofinance le congé. Le but est de rendre cette opportunité accessible à tous, y compris aux travailleurs à revenus plus modestes. De plus, ce système serait structuré de manière à garantir sa compatibilité avec la législation actuelle, ce qui assurerait sa viabilité à long terme et son efficacité fiscale. Pour compléter ce dispositif, un outil interactif de conseil est en cours de développement afin de permettre aux salariés de planifier précisément leur congé sabbatique, en évaluant la durée et le coût, tout en veillant à maintenir leurs cotisations.
Un modèle gagnant-gagnant pour les employés et les entreprises
Au-delà des avantages évidents pour les travailleurs, ce projet de préfinancement des congés sabbatiques pourrait également bénéficier aux entreprises. En effet, la possibilité d’offrir des congés sabbatiques sans pénaliser la retraite des employés favorise l’équilibre entre vie professionnelle et personnelle, ce qui peut améliorer la satisfaction et la fidélisation des collaborateurs. En outre, des congés bien intégrés permettent de réduire les absences pour maladie et de prévenir le burnout, créant ainsi un environnement de travail plus sain.
Certaines entreprises en Suisse, comme la Banque cantonale de Zurich, les Transports publics bâlois ou l’Hôpital cantonal de Lucerne, ont déjà montré leur soutien à ce modèle, ce qui démontre un intérêt croissant pour cette nouvelle approche. Pour les entreprises, cette initiative pourrait également se traduire par des économies indirectes, notamment grâce à une meilleure gestion du personnel et une réduction du turnover. De plus, un tel système de préfinancement pourrait devenir une véritable opportunité pour les employeurs soucieux de répondre aux attentes croissantes de flexibilité et de bien-être des salariés.
En dépit de ces avantages, il convient de souligner que ce modèle de préfinancement reste encore à l’état de projet. Si les premiers résultats sont prometteurs, notamment grâce à des soutiens financiers de poids comme celui de l’agence publique Innosuisse, des questions demeurent sur son déploiement à grande échelle. Toutefois, un sondage mené par l’institut Sotomo en février 2025 a révélé que trois quarts des personnes interrogées se montrent favorables à l’idée d’un système de préfinancement pour les congés sabbatiques, et deux tiers seraient prêtes à y recourir si ce dispositif était mis en place. Cela témoigne d’une forte adhésion de la population à l’idée de rendre la prévoyance plus flexible et plus accessible.








