L’État gaspille l’argent des Suisses : des retards à Berne coûtent des millions aux contribuables 

Les retards dans la mise en œuvre des recommandations du CDF génèrent des inefficacités et des coûts supplémentaires pour les finances publiques.

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Retards
L'État gaspille l'argent des Suisses : des retards à Berne coûtent des millions aux contribuables : Crédit : Canva | Econostrum.info - Suisse

En Suisse, la gestion des finances publiques repose sur le Contrôle fédéral des finances (CDF), une autorité indépendante chargée de veiller à l’efficacité et à la transparence de l’utilisation des fonds publics. Cependant, un certain nombre de retards dans la mise en œuvre des recommandations du CDF ont des conséquences financières directes pour les citoyens. 

Ces retards, qui se cumulent sur plusieurs années, sont responsables de coûts supplémentaires et d’une gestion moins optimale des ressources publiques. En conséquence, les contribuables suisses supportent indirectement les conséquences de ces inefficacités administratives, qui auraient pourtant pu être évitées avec une gestion plus rigoureuse.

La liste des lacunes : des retards persistants et coûteux

Le Contrôle fédéral des finances est chargé d’examiner les décisions financières des autorités fédérales, de détecter les erreurs et d’émettre des recommandations visant à améliorer les pratiques et à réduire les inefficacités. Lorsque certaines recommandations sont acceptées mais non mises en œuvre dans les délais, elles sont inscrites dans une « liste des lacunes », un document qui recense les manquements persistants. Cette liste est rendue publique à la fin de chaque année, et il est impératif que les autorités concernées rendent compte de l’avancement des mises en œuvre.

L’analyse réalisée par Blick montre que la liste actuelle compte 25 recommandations en suspens, un chiffre en hausse par rapport aux années précédentes. Par exemple, l’année d’avant, il y avait 17 recommandations en attente, et en 2022, 18. Ces retards sont d’autant plus inquiétants que certaines recommandations figurent dans la liste depuis une dizaine d’années, comme celles relatives à la gestion du matériel militaire excédentaire ou à l’automatisation des services administratifs de l’AVS et de l’AI. Ces manquements persistent malgré des délais de mise en œuvre initiaux dépassés de plusieurs années.

Un exemple concret concerne la gestion du matériel militaire hors d’usage. Le CDF avait recommandé dès 2015 une gestion plus efficace du stockage de matériel excédentaire, à coût élevé pour la Confédération. Cependant, le suivi de ces coûts a été interrompu et aucune stratégie claire n’a été mise en place, laissant la situation sans solution. De même, une recommandation en 2018 conseillait d’automatiser le traitement des factures au sein des services de l’AVS et de l’AI pour accroître leur efficacité. Or, cette automatisation n’a toujours pas été achevée, malgré la nécessité avérée d’améliorer ces processus.

Ces exemples sont symptomatiques d’un problème récurrent au sein de l’administration suisse, où des décisions importantes sont prises, mais leur mise en œuvre reste souvent négligée ou retardée. Cette situation se traduit par des coûts supplémentaires qui pourraient être évités si les recommandations étaient appliquées dans les délais convenus.

Pourquoi ces retards persistent-ils ?

Le CDF a émis plusieurs hypothèses pour expliquer ces retards chroniques dans la mise en œuvre des recommandations. Premièrement, certains départements de l’administration fixent des délais de mise en œuvre qui se révèlent souvent irréalistes. Ces délais sont parfois basés sur des objectifs ambitieux, mais la réalité des ressources et des capacités disponibles rend leur respect difficile. Arnaud Bonvin, porte-parole du CDF, souligne qu’il y a souvent un décalage entre les aspirations des services concernés et ce qui est réellement possible dans les délais impartis.

En outre, certains départements déclarent avoir mis en œuvre certaines recommandations alors que le CDF, après un nouvel audit, constate que les changements n’ont pas été réalisés comme prévu. Cette divergence entre les déclarations des autorités et les évaluations du CDF est un autre facteur qui contribue à l’accumulation des retards. Lorsque de tels écarts sont identifiés, des mesures supplémentaires sont demandées pour corriger la situation.

Le Département fédéral de la Défense, de la Protection civile et du Sport (DDPS) est particulièrement concerné par ce phénomène. Il représente à lui seul six des 25 recommandations en suspens pour 2024. Le CDF n’a pas identifié de tendance spécifique derrière ces retards, mais il note que certains départements rencontrent plus de difficultés que d’autres pour appliquer les recommandations dans les temps. Il n’en reste pas moins que ces retards ont un coût direct, tant pour l’efficacité de l’État que pour le porte-monnaie des contribuables.

Des retards coûteux pour les finances publiques

Les retards dans la mise en œuvre des recommandations du CDF n’ont pas seulement des conséquences administratives, mais aussi financières. En effet, les inefficacités générées par ces manquements se traduisent par des coûts supplémentaires qui pèsent sur les finances publiques. Par exemple, le matériel militaire excédentaire stocké sans stratégie claire coûte des milliers, voire des millions de francs à l’État, sans retour sur investissement. De même, l’absence d’automatisation dans le traitement des dossiers de l’AVS et de l’AI entraîne une surcharge de travail pour les agents publics, allonge les délais de traitement et augmente les coûts administratifs.

Les retards dans la simplification des systèmes informatiques ou dans l’amélioration des processus administratifs ralentissent l’efficacité des services publics. Ces coûts supplémentaires, bien qu’apparemment marginaux, s’accumulent au fil du temps et peuvent avoir un impact important sur le budget national. Le CDF, bien qu’efficace dans l’identification des problèmes, peine parfois à faire en sorte que les recommandations soient appliquées dans les délais impartis, ce qui nuit à la gestion optimale des finances publiques.

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