L’industrie suisse traverse une période critique, caractérisée par une crise profonde dans plusieurs secteurs. Des milliers d’emplois sont supprimés chaque mois, alimentant une vague de licenciements qui touche des entreprises de taille variée. En parallèle, le nombre de demandeurs d’emploi atteint un chiffre préoccupant de 261 000 personnes, et les offres d’emploi se font de plus en plus rares.
L’ampleur de cette crise est inquiétante et témoigne des difficultés croissantes rencontrées par le marché du travail suisse. Ce phénomène touche particulièrement l’industrie manufacturière et la pharmaceutique, et devrait encore s’intensifier dans les mois à venir.
Une industrie en déclin : licenciements massifs et fermetures d’usines
L’industrie suisse connaît un déclin brutal avec la suppression massive de postes dans plusieurs secteurs clés. L’industrie automobile, en particulier, subit de plein fouet la crise. Des entreprises comme SFS, Brusa Hypower AG et Mubea ont annoncé des licenciements drastiques. SFS ferme son usine de Flawil (SG), entraînant la suppression de 75 emplois. Brusa Hypower AG a également décidé de réduire de 55 postes à Buchs et Sennwald, tandis que Mubea fermera son usine de tubes d’acier d’Arbon en 2026, supprimant ainsi 100 emplois. Ces suppressions de postes ne sont que quelques exemples parmi d’autres, illustrant une crise qui dure depuis plus de deux ans. Selon les données de l’Office fédéral de la statistique (OFS), le secteur industriel suisse a perdu 7 600 emplois au troisième trimestre 2025 par rapport à l’année précédente. Cette tendance touche de nombreux secteurs : l’horlogerie, la construction de machines, l’industrie chimique, et bien d’autres.
En conséquence, la recherche d’emploi dans ces domaines est devenue de plus en plus difficile. Pascal Scheiwiller, CEO d’Alixio Group Suisse, souligne que la pénurie de main-d’œuvre tant redoutée dans l’industrie manufacturière n’existe plus, selon Blick. Au contraire, les entreprises deviennent beaucoup plus sélectives, cherchant le candidat « idéal ». Cela aggrave la situation pour les demandeurs d’emploi, qui se retrouvent confrontés à un marché du travail de plus en plus compétitif, mais avec moins d’opportunités.
Le chômage en forte hausse et la diminution des offres d’emploi
Le chômage en Suisse, actuellement à 5,1 %, touche 261 000 personnes selon l’Organisation internationale du travail (OIT), mais ce chiffre ne reflète qu’une partie de la réalité. De nombreuses personnes ne sont pas inscrites comme demandeurs d’emploi, notamment celles qui ont été licenciées récemment et qui n’ont pas encore trouvé une nouvelle opportunité. En réalité, plus d’un demi-million de personnes seraient affectées par la pénurie de main-d’œuvre, un chiffre qui inclut les travailleurs partiels et ceux qui cherchent à augmenter leur activité. Cette situation met en lumière une disparité croissante entre les profils des demandeurs d’emploi et les exigences des entreprises. La sélection plus stricte des candidats, combinée à la diminution des postes vacants, rend la recherche d’emploi particulièrement ardue.
Les incertitudes économiques mondiales, exacerbées par les tensions commerciales et géopolitiques, contribuent également à cette situation. Les droits de douane américains et d’autres facteurs externes ont incité de nombreuses entreprises à réduire leurs effectifs pour minimiser les risques financiers. De plus en plus de sociétés, notamment dans les secteurs pharmaceutique et de l’assurance, se sont engagées dans des programmes d’économies drastiques. Par exemple, Pfizer prévoit de réduire son effectif en Suisse de 300 à 70 postes, tandis que Novartis a annoncé la suppression de 550 postes sur son site de Stein AG. L’industrie pharmaceutique, autrefois l’un des moteurs de l’économie suisse, n’échappe pas à cette tendance inquiétante.
Les entreprises, confrontées à des pressions de coûts croissantes, sont désormais beaucoup plus réticentes à embaucher. Les employeurs recherchent souvent le candidat idéal, celui qui correspond parfaitement à leurs besoins, ce qui complique la situation pour les demandeurs d’emploi, explique Martin Meyer, expert en marché du travail pour Adecco Suisse. Cette recherche de perfection rend l’accès à l’emploi de plus en plus difficile, notamment dans des secteurs comme l’administration, où l’automatisation et l’intelligence artificielle (IA) modifient en profondeur les modes de recrutement.
Perspectives incertaines pour l’économie suisse
Les perspectives pour l’économie suisse restent préoccupantes. Les experts s’attendent à une faible croissance économique pour 2026, avec une augmentation continue du chômage. Selon Economiesuisse, la récession dans plusieurs secteurs industriels pourrait entraîner de nouveaux licenciements et une poursuite de la baisse du nombre d’offres d’emploi. Les entreprises, dans un contexte incertain, continuent de privilégier des stratégies de réduction des coûts, laissant présager une faible reprise de l’emploi dans les prochains mois.
La situation actuelle pourrait également entraîner une pression supplémentaire sur les travailleurs existants, notamment dans les secteurs où l’automatisation joue un rôle de plus en plus important. Les travailleurs les plus vulnérables, en particulier ceux dont les compétences sont obsolètes ou non adaptées aux nouvelles exigences du marché, pourraient avoir plus de difficulté à s’intégrer dans le monde du travail de demain.








