Accord sur les droits de douane avec les États-Unis : A quel prix la Suisse achète-t-elle vraiment cette diminution?

Si l’accord avec les États-Unis permet de soulager l’industrie exportatrice suisse à court terme, il soulève des questions importantes sur ses implications à long terme pour l’économie et la politique extérieure de la Suisse.

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Accord sur les droits de douane avec les États-Unis : A quel prix la Suisse achète-t-elle vraiment cette diminution? : Crédit : KEYSTONE/Christian Beutler | Econostrum.info - Suisse

L’accord récemment conclu entre la Suisse et les États-Unis concernant les droits de douane est perçu comme une bouffée d’oxygène pour l’industrie exportatrice suisse. Après des mois de tensions commerciales, le ministre de l’Économie, Guy Parmelin, a annoncé que les droits de douane imposés par les États-Unis seraient abaissés de 39 % à 15 % avec effet rétroactif au 14 novembre. 

Si cette décision est saluée par certains, elle soulève également de vives préoccupations au sein du Conseil national, notamment en ce qui concerne l’impact sur l’économie suisse et les investissements massifs promis par les États-Unis. Derrière cette annonce, plusieurs élus s’interrogent sur le prix que la Suisse est prête à payer pour maintenir des relations commerciales stables avec son premier partenaire commercial hors de l’Union européenne.

Les avantages immédiats, mais des sacrifices à long terme ?

La baisse des droits de douane de 39 % à 15 % a été accueillie positivement par l’industrie suisse, en particulier par les secteurs des exportations qui dépendent largement des marchés étrangers, comme l’horlogerie, le chocolat et les produits pharmaceutiques. Selon Guy Parmelin, cette mesure est dans l’intérêt de l’économie suisse, car elle permet de maintenir des relations commerciales stables avec les États-Unis, un marché clé pour les exportations helvétiques.

Cependant, plusieurs membres du Conseil national, notamment Olivier Feller (PLR/VD), ont tempéré cet optimisme. Selon eux, cette réduction n’est pas une « victoire », mais plutôt une « limitation des dégâts », une solution provisoire qui ne règle pas les problèmes à long terme. Corina Gredig (PVL/ZH) a ajouté que bien que la réduction soit bénéfique, elle ne constitue qu’une réponse à court terme aux tensions commerciales croissantes avec les États-Unis. De plus, l’investissement massif promis par les États-Unis, estimé à 200 milliards de francs, a également suscité des interrogations. Ces fonds ne seront vraisemblablement pas investis en Suisse, ce qui pourrait nuire à la compétitivité des entreprises suisses et affecter négativement l’emploi dans certains secteurs.

Les inquiétudes portent également sur les conséquences que ces investissements auront sur l’économie suisse. Aline Trede (Verts/BE) a soulevé la question du prix de cet accord : « À quel prix achetons-nous cette diminution des droits de douane ? » La question se pose avec encore plus d’acuité, car ces investissements pourraient entraîner une perte de parts de marché et de ressources financières pour la Suisse, au profit d’autres pays, notamment les États-Unis.

L’impact géopolitique et la dépendance croissante

Le Conseil national, dans son débat, a également exprimé des préoccupations géopolitiques, notamment sur la dépendance croissante de la Suisse vis-à-vis des États-Unis. Raphael Mahaim (Vert-e-s/GE) a fait une déclaration provocante, demandant si, dans un futur proche, la Suisse allait « vendre le Cervin à Donald Trump », rapporte Blick. Cette remarque ironique reflète l’inquiétude de certains élus, qui craignent que la Suisse soit de plus en plus soumise aux caprices de Washington.

Cédric Wermuth (PS/AG) a également mis en garde contre l’arbitraire des États-Unis, soulignant que, bien que la Suisse puisse négocier de bons accords, elle doit être prête à faire face aux incertitudes liées à la politique américaine. Il a souligné que la stratégie de Washington semble viser à fragmenter l’unité européenne, ce qui pose une menace potentielle pour la stabilité géopolitique du continent.

De plus, les discussions ont révélé une autre inquiétude : l’affaiblissement des relations de la Suisse avec ses voisins européens. Pour certains, cet accord avec les États-Unis pourrait éloigner la Suisse de ses partenaires européens, ce qui serait contraire aux intérêts à long terme de la nation. La mise en avant des Bilatérales III, qui visent à renforcer les liens avec l’UE, est apparue comme une voie alternative pour diminuer la pression exercée par les États-Unis et protéger les intérêts de la Suisse sur la scène internationale.

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