Trump impose 39 % de droits de douane sur les produits suisses

Les États-Unis imposent 39 % de droits de douane à la Suisse, malgré des négociations, ciblant surtout l’industrie pharmaceutique helvétique.

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Président Trump
Trump impose 39 % de droits de douane sur les produits suisses - © Sutterstock

Les États-Unis appliqueront dès le 7 août une surtaxe douanière de 39 % sur les produits suisses. Cette décision, officialisée par un décret signé par Donald Trump, place la Suisse parmi les pays les plus durement touchés, juste derrière la Syrie. Le nouveau tarif douanier s’appliquera à tous les produits, à l’exception de ceux chargés avant cette date et arrivant avant le 5 octobre.

La mesure s’inscrit dans une politique américaine de rééquilibrage commercial et survient malgré des semaines de négociations entre Berne et Washington. Les discussions, jugées constructives par la Confédération, ont échoué à la dernière minute. Une déclaration commune avait été rédigée, mais elle n’a jamais été signée par la présidence américaine.

Un revirement brutal après des négociations intensives

Pendant plusieurs semaines, les autorités suisses avaient engagé des démarches diplomatiques pour éviter une augmentation des tarifs douaniers américains. Karin Keller-Sutter, présidente de la Confédération, avait personnellement contacté Donald Trump.

Des déjeuners de travail s’étaient tenus à l’ambassade américaine et le Conseil fédéral avait validé une déclaration d’intention. Le ministre de l’Économie Guy Parmelin et la secrétaire d’État Helene Budliger Artieda affichaient également leur confiance.

Pourtant, la Maison Blanche a publié une liste ajustée de droits de douane peu avant la fin du délai de négociation. Soixante-et-un pays et territoires y figurent, dont la Suisse avec un taux de 39 %, soit 8 points de plus que les 31 % évoqués lors des premiers échanges.

Blick souligne qu’aucun autre pays européen ne se retrouve avec une taxation aussi élevée. Le Japon, la Corée du Sud ou l’Union européenne obtiennent un tarif de 15 %, certains secteurs étant exemptés conformément à des accords spécifiques.

La surtaxe de 39 % se situe juste derrière celle imposée à la Syrie (41 %). D’autres pays comme l’Algérie (30 %), le Bangladesh (20 %), le Laos (40 %) ou la Turquie (15 %) sont également concernés. Tous les pays du monde étaient déjà soumis à une surtaxe plancher de 10 % depuis avril, en plus des droits de douane existants.

Une décision justifiée par le déficit commercial selon Trump

Dans le décret signé par Donald Trump, les États-Unis invoquent un déficit commercial comme principal motif. En 2024, le commerce de marchandises entre les deux pays s’est traduit par un déficit américain de 38,5 milliards de francs suisses. Les exportations helvétiques concernent en majorité l’industrie pharmaceutique, suivie par l’or, les bijoux et les montres.

Le média helvétique note toutefois que cette analyse omet les services, domaine dans lequel les géants technologiques américains comme Meta ou Alphabet sont actifs en Suisse.

En tenant compte de ce volet, le déficit tombe à 18 milliards. L’échelle des deux marchés est également mentionnée : les 9 millions de Suisses achètent en moyenne plus de produits américains que les 340 millions d’Américains de produits suisses.

Trump aurait également accusé la Suisse de manipuler sa monnaie via la Banque nationale suisse pour affaiblir le franc. Or, depuis les premières menaces douanières, le franc s’est renforcé de près de 10 % face au dollar, affaiblissant cette accusation. Pour rappel la Suisse a supprimé ses droits de douane industriels depuis plusieurs années et taxe peu les produits américains, à l’exception du secteur agricole.

Une Suisse isolée dans une logique bilatérale

L’Union européenne, qui a obtenu un accord limitant la surtaxe à 15 %, a négocié en contrepartie d’importants engagements d’achat : 750 milliards d’euros d’énergie et 600 milliards d’armes auprès des États-Unis. LLa Suisse aurait également proposé de grands projets d’investissement, sans succès.

Trump viserait notamment l’industrie pharmaceutique suisse, estimant que les prix élevés des médicaments aux États-Unis sont liés à des pratiques déloyales. Il aurait adressé un ultimatum aux PDG des grands groupes pharmaceutiques, dont ceux de Roche et Novartis : baisser les prix ou faire face à des représailles.

Selon Thomas Cottier, professeur émérite à l’Université de Berne, ces mesures violent les règles de l’Organisation mondiale du commerce. Il estime que les « droits de douane exorbitants » décidés par l’administration Trump sont illégaux.

La Suisse pourrait engager une procédure auprès de l’OMC, mais elle risquerait de provoquer des réactions encore plus sévères de la part de Washington. La petite taille du marché suisse rend difficile toute pression unilatérale sur les États-Unis, et qu’un soutien international paraît peu probable.

Enfin, une cour d’appel fédérale américaine a exprimé des doutes sur la légalité des droits de douane imposés par Donald Trump. Cinq entreprises américaines et douze États démocrates ont saisi la justice. Selon eux, seul le Congrès – et non le président – a le pouvoir de fixer les droits de douane. Une première instance leur a donné raison le 28 mai, mais une décision finale prendra du temps, indique Blick.

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