Sécurité sociale : 23 milliards d’euros de déficit, la Cour des comptes tire la sonnette d’alarme

La cour des comptes a tiré la sonnette d’alarme sur le déficit de la Sécurité sociale.

Publié le
Lecture : 3 min
Cour des comptes
Livret A, taxe foncière et héritage : voici ce que préconise la Cour des comptes pour une meilleures justice fiscale . Crédit : Canva | Econostrum.info

La Cour des comptes a publié le 3 novembre 2025 une note de 35 pages adressée à la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, à la veille de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2026.

Le document met en lumière une situation financière jugée préoccupante pour l’ensemble du système, évoquant une « impasse de financement » et une perspective de redressement « fragile en 2026 ». Selon la Cour, malgré certaines mesures d’économies adoptées en 2025, le déficit de la Sécurité sociale aura doublé en deux ans. Il atteindrait 23 milliards d’euros en 2025, soit un milliard de plus que l’objectif initial fixé par le gouvernement. En 2024, le déficit s’élevait à 15,3 milliards d’euros, contre 10,8 milliards l’année précédente. Hors période de crise sanitaire, ce niveau n’avait pas été observé depuis 2012.

La Cour explique cette évolution par la combinaison de dépenses sociales dynamiques et de recettes jugées insuffisantes. Les dépenses continuent de croître de 3,7 % en 2025, après une progression de 5,4 % en 2024, tandis que les recettes ne progressent que de 2,4 %. Les prévisions de croissance économique, estimées à 0,7 %, demeurent insuffisantes pour compenser ce déséquilibre.

La note souligne que toutes les branches de la Sécurité sociale sont désormais déficitaires, à l’exception de la branche Famille. La branche Maladie affiche un déficit de 17,2 milliards d’euros, celle de la Vieillesse de 5,8 milliards, tandis que les branches Accidents du travail et Autonomie passent légèrement dans le rouge après plusieurs exercices excédentaires.

Des recettes en stagnation et des dépenses sous tension

Les hausses de recettes mises en œuvre en 2025, notamment par la réduction d’allègements de cotisations et la participation accrue des collectivités locales, ont permis de récupérer 6,7 milliards d’euros. Toutefois, cette progression n’a pas suffi à compenser la faiblesse des cotisations sociales. La Cour note que les recettes traditionnelles se sont affaiblies sous l’effet du ralentissement économique et de la baisse de la masse salariale.

Du côté des dépenses, la progression reste soutenue malgré les mesures d’économies prévues dans le cadre du budget 2025. L’Objectif national des dépenses d’assurance maladie (Ondam), fixé à 265,9 milliards d’euros, devrait être respecté selon le gouvernement, mais la Cour exprime des doutes. L’institution évoque des dépassements dans plusieurs secteurs, notamment hospitalier, où les deux tiers des établissements publics seraient déficitaires. Le déficit cumulé des hôpitaux atteindrait, selon les magistrats, « un niveau jamais observé ».

Pour 2026, la Cour anticipe une aggravation du déficit global de 5,7 milliards d’euros supplémentaires, liée à la poursuite de la hausse tendancielle des dépenses sociales. Le projet de loi de financement prévoit un effort global de 11 milliards d’euros, dont 9 milliards de réductions de dépenses, obtenus grâce au gel des retraites et prestations sociales, à des économies sur l’assurance maladie et les allocations familiales.

Des perspectives budgétaires incertaines pour la Sécurité sociale 

Les recettes pour 2026 devraient augmenter de 2 milliards d’euros, notamment par la réforme des exonérations de cotisations et la suppression de certaines niches fiscales. Ces mesures porteraient le total des recettes à 659,4 milliards d’euros, pour des dépenses estimées à 676,9 milliards. Le déficit serait ramené à 17,5 milliards d’euros.

La Cour des comptes juge toutefois ce scénario fragile, car il repose sur des hypothèses économiques dites « volontaristes ». Les projections gouvernementales prévoient un déficit annuel d’environ 17 milliards d’euros entre 2027 et 2029, sans retour à l’équilibre. Cette situation pourrait placer l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), chargée du financement à court terme, face à un risque de liquidité. Sa capacité d’emprunt, limitée à 65 milliards d’euros, pourrait être insuffisante pour couvrir les besoins mensuels.

Pour éviter cette situation, la Cour suggère de transférer à nouveau une partie de la dette de l’Acoss vers la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), qui avait déjà repris 136 milliards d’euros de dettes en 2020. Un tel transfert nécessiterait cependant une loi organique, car il impliquerait de modifier le cadre constitutionnel.

Le premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, appelle à un retour rapide vers l’équilibre et à la mise en place d’un « pilotage cohérent » du financement de la protection sociale. Selon le rapport, seule une réforme structurelle permettra d’assurer la stabilité financière du système sur le long terme.

 

Laisser un commentaire

Partages