L’ex-Première ministre, Élisabeth Borne, a mis en avant, lors de la conférence sociale sur les bas salaires, qui eu lieu le 16 octobre 2023 à Paris, un tassement des rémunérations et des perspectives d’augmentation des salaires amoindries. Pour trouver les explications à ce phénomène de nivellement par le bas des grilles de salaires, Elisabeth Borne avait alors proposé la mise en place d’un Haut Conseil des rémunérations et lancé une mission pour étudier les causes de cette smicardisation.
Depuis, le Haut Conseil du financement de la protection sociale a chargé l’institut économique Rexecode de faire une étude de terrain. Ses résultats ont été rendus publics le 19 juin. Menée avec Bpifrance auprès de 3 000 entreprises de toutes tailles, l’enquête révèle que les causes de la smicardisation sont plus complexes que le seul effet de « trappe à bas salaires ». Dans le détail, 8 % des entreprises consultées citent le nivellement des salaires par le bas comme principal frein à l’augmentation salariale de leurs employés. Ce phénomène ne fait qu’ « amplifier les problèmes existants », affirme Olivier Redoulès, directeur des études de Rexecode.
L’étude révèle, par ailleurs, que les contraintes purement économiques, comme la marge ou la trésorerie de l’entreprise, sont les principaux freins à la hausse des salaires. La deuxième raison de la stagnation des salaires est due aux donneurs d’ordre, selon cette étude. Ces gestionnaires jouent un rôle essentiel dans les politiques salariales de leurs entreprises prestataires, notamment dans les services à faible valeur ajoutée.
« Dans un certain nombre de secteurs, comme la sécurité, le nettoyage, l’entretien, les acheteurs regardent uniquement le prix du service proposé », explique le directeur des études de Rexecode, ajoutant que « ce type de comportement des acheteurs conduit les entreprises à pressurer les salaires pour pouvoir emporter les marchés ».
Les raisons de la smicardisation des salaires
L’étude met en avant un autre phénomène. Pour certains employés du bas de l’échelle, une hausse salariale peut se traduire par la perte de certaines aides sociales, comme l’APL, ou de primes, à l’instar de la prime d’activité, versée par l’État, indique l’étude. Ainsi, ce système conçu pour compenser les bas salaires a un effet indésirable. En effet, il peut conduire, dans certains cas, des salariés à se maintenir de manière contrainte « sur des trajectoires salariales peu dynamiques » pour éviter de perdre des droits, souligne l’étude.
Les économistes de Rexecode indiquent également que près de 25 % des entreprises consultées emploient régulièrement des personnes à temps partiel. Il s’agit notamment des entreprises de services, très féminisées, avec une part importante de CDD. Pour ces dernières, augmenter la durée du travail est souvent le principal levier d’amélioration de leur rémunération mensuelle.
Toutefois, dans 40 % des cas, les employeurs se heurtent à des exigences horaires de leurs clients, qui conduisent à établir des plannings fractionnés. Cela induit de très fortes contraintes pour les salariés concernés. « Certains ne veulent pas voir les femmes de ménage dans les locaux lorsqu’ils y sont présents », cite en exemple M. Redoulès.
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