Depuis de nombreuses années, la France dominait le classement des investissements directs à l'étranger (IDE) au Maroc. Toutefois, elle a été récemment surpassée par les États-Unis, qui sont maintenant le principal investisseur dans le pays.
Un « partenariat stratégique » d'envergure
En 2020, le montant des investissements français au Maroc se chiffrait à 3,9 milliards de dirhams. Ils ont connu un rebond en 2021, passant à 7,4 milliards de DH, avant de s'écrouler en 2022 à 3,2 milliards de DH. Dans le même temps, les investissements américains, qui n'étaient que de 436 millions d'euros en 2020, ont explosé en 2022 pour s'élever à 7,4 milliards de DH. Les investissements américains dans le royaume ont ainsi ravi la première place aux Français. Cette position de choix qu'occupent désormais les investissements américains témoigne de la profondeur du « partenariat stratégique » qui lie les deux pays.
Cette coopération, qui va au-delà de l'aspect économique et financier, reflète également leur convergence sur des enjeux politiques, comme l'illustre la reconnaissance par l'ex-Président Donald Trump de la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental, en décembre 2020. La France conserve néanmoins sa position de « plus grand détenteur de capitaux étrangers au Maroc » avec environ 31 %. Aussi, elle occupe toujours la première place en ce qui concerne la « répartition des réserves d’investissements directs étrangers ».
Tayeb Aais, analyste financier et économiste, a été interrogé par le média Hespress. Il a évoqué l'importance de la montée en puissance des investissements marocains dans le royaume chérifien, ainsi que leur portée politique. « L'apport de l’Amérique est immense pour la qualité des investissements au Maroc, dans les différentes régions du Royaume, tant au nord qu’au sud. La reconnaissance officielle par Washington de la souveraineté du Maroc sur son Sahara a fortement contribué au flux d’IDE vers le Royaume », a-t-il déclaré.
« D'énormes fonds américains » profitent au Maroc
Les investissements américains, aussi importants en valeur qu'en diversité, touchent de nombreux secteurs de l'économie marocaine. Ils s'étendent des industries métallurgiques aux projets d’épuration et de dessalement de l’eau, en passant par le recyclage des eaux usées et le secteur des technologies et des services et les énergies renouvelables, notamment l’hydrogène.
Tayeb Aais parle d'un « saut qualitatif important qui marquera l’histoire des relations bilatérales entre le Maroc et l’Amérique, pas seulement au niveau économique, mais également politique et sécuritaire ». La présence économique américaine est récente au Maroc. « Depuis l’ère de Trump et son penchant pour les affaires, l’intérêt américain s’est remarquablement accru pour la faisabilité d’investir dans des projets marocains », explique l'analyste.
L'évolution vers un partenariat accru avec les États-Unis signifie par ailleurs l'adoption d'un modèle plus souple et pragmatique, souligne-t-il. Il se fait au profit de l'abandon du système français, lourd par son aspect juridique et administratif. « Le Maroc peut bénéficier d’énormes fonds américains qui génèrent des rendements nets en faveur de l’économie marocaine. Une étape animée par la culture du retour sur investissement et la création d’emplois au sein d’un tissu économique intégré », ajoute-t-il.
Tayeb Aais appelle, pour conclure, « à la nécessité d’harmoniser et d’accompagner ces transformations en cours dans la carte des pays investisseurs au Maroc, en modernisant et en élaguant le cadre juridique et institutionnel qui doit développer certains mécanismes attractifs et qui doit faciliter l’investissement étranger direct ».