Alors que le gouvernement ambitionne de répondre à la crise du logement via son projet présenté vendredi au Conseil des ministres, les associations des locataires, elles, montent au créneau pour dénoncer ce qu'elles qualifient de « loi clientéliste ». Le durcissement des conditions d’accès au logement social fait craindre des lendemains incertains pour les ménages les plus fragiles.
Il sera également présenté devant le Sénat à la mi-juin. Le projet de loi sur le logement, présenté le 3 mai au Conseil des Ministres, inquiète les acteurs du secteur. En cause, certaines règles d’accès aux habitations à loyer modéré (HLM) qui pourraient être durcies.
Le gouvernement explique, que ce projet permettra de mettre en place les conditions d’un « choc d’offres » à même de faciliter l’accès au logement. La méthode privilégiée semble être la construction de logements pour augmenter l’offre. Cette démarche, explique-t-on, permet de baisser la tension et de ralentir la hausse des prix.
Pourquoi le projet inquiète-t-il ?
Cependant, du côté des défenseurs du logement, les choses ne sont pas vues du même angle. Des inquiétudes sont nées avant même la présentation du projet. Ils estiment que le durcissement de quelques modalités d’accès aux logements à loyer modéré (HLM) impactera négativement les bourses des ménages les plus fragiles.
Il en va de même pour la volonté du gouvernement de donner plus de prérogatives aux maires dans le processus d’attribution qui font craindre l’émergence d’un « clientélisme électoral » ou même « une préférence nationale ». En fait, la crise du logement s’explique par l’arrêt, presque total, de la construction de nouveaux logements.
Cela engendre un déséquilibre de l’offre et de la demande. Aussi, à cause de la hausse des prix qui en résulte, la grande majorité des Français se retrouve dans l’impossibilité d’acheter un logement. La baisse de l’offre et la hausse des prix dans ce créneau ont fini par provoquer un transfert de la demande sur le marché de la location.
L’afflux massif vers cette formule engendre, de son côté, la saturation. Un autre transfert de la demande s’effectue, par conséquent, vers le logement social, provoquant, encore, une forte tension. Le nombre de ménages en attente d’un HLM est ainsi estimé à 2,6 millions.
Aussi, comme solution visant à baisser cette tension, le gouvernement a décidé de durcir les conditions d’accès. Les Français aux revenus dépassant le plafond autorisant l’accès au HLM sont les premiers touchés par la mesure avec, en perspective, la majoration de leur loyer et la possibilité d’en être expulsés. Selon les statistiques révélées par le gouvernement, 8 % des personnes vivant actuellement dans les HLM sont concernées, y compris les smicards.
Les défenseurs du logement social montent au créneau
Commentant la décision du gouvernement pour l'AFP, la fondation Abbé Pierre s’interroge : « Pourquoi vouloir affaiblir la loi SRU, donner une prime à ceux qui ne l'ont pas suffisamment appliquée depuis 20, 25 ans, alors que d'autres s'y sont collés ? ».
00Son délégué général, Christophe Robert s'interroge ainsi sur l’avenir des Français qui pourraient être exclus en vertu du durcissement des règles. De son côté, Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole de l'association Droit au logement, considère que « la loi vise à produire du LLI pour cadre sup’ dans les zones tendues au détriment du logement social ».
Bastien Marchive, député des Deux-Sèvres, propose d’assouplir la loi SRU pour encourager les communes les moins vertueuses à investir dans le logement intermédiaire, parce qu’estime-t-il, les amendes ne donnent pas de résultats. Christophe Robert estime, de son côté, que « vouloir affaiblir la loi SRU », c’est « donner une prime à ceux qui ne l’ont pas suffisamment appliquée depuis 20, 25 ans, alors que d’autres s’y sont collés ? ».
Ian Brossat, Sénateur de Paris, estime que « ce n’est pas avec un jeu de chaises musicales qu’on va régler le problème. On va virer des locataires du parc social, mais ils ne pourront pas se loger dans le privé ». Pour lui, « le fond de l’affaire, c’est qu’on manque de logements sociaux ».
Enfin, rappelons que la loi SRU (Solidarité et Renouvellement Urbain) votée en 2000, impose aux communes de disposer d'un quota de 20 à 25 % de logements sociaux. Elles sont actuellement 2 100 communes en zone urbaine à être concernées par cette disposition.