Imbroglio au Parlement : c’est quoi cet amendement en faveur des entreprises adopté par erreur ?

Un amendement présenté pour ouvrir le débat sur la fiscalité des entreprises a été adopté par erreur, privant la Sécurité sociale de 5,4 milliards d’euros.

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Amendement
Contribution sociale des sociétés (C3S) : un amendement adopté par erreur coûterait 5,4 milliards à la Sécu - Crédit : Canva | Econostrum.info

Une simple manœuvre parlementaire a suffi à créer un véritable imbroglio à l’Assemblée nationale. Jeudi 6 novembre, un amendement visant à supprimer la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) a été adopté malgré l’intention initiale de son auteur de ne pas le voir passer. Le résultat : une perte potentielle de 5,4 milliards d’euros pour la branche vieillesse et une secousse dans le débat sur le financement de la Sécurité sociale.

La C3S s’applique aux entreprises réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 19 millions d’euros et est calculée au taux de 0,16 %. Son paiement est obligatoire chaque année avant le 15 mai, avec des majorations en cas de retard, pouvant atteindre 10 % du montant dû, puis 4,8 % par année de retard supplémentaire. Cette contribution, souvent critiquée par les entreprises, finance notamment l’assurance vieillesse et constitue une source stable de recettes pour l’État.

Une adoption involontaire et rocambolesque

L’amendement de Sitzenstuhl était un « amendement d’appel », destiné à ouvrir le débat sur la fiscalité des entreprises dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2026. L’auteur ne souhaitait pas sa suppression immédiate, mais plutôt relancer la discussion sur les impôts de production et la réindustrialisation.

Pourtant, le texte a été repris à la volée par des députés du Rassemblement national et soumis au vote. Le résultat fut serré : 117 voix pour, 113 contre et 10 abstentions. À cela s’ajoute la confusion de plusieurs députés de la majorité présidentielle (LR, Modem et Renaissance) qui ont voté « pour » par erreur, alors qu’ils voulaient voter « contre ». La scène a été qualifiée de rocambolesque, mais les conséquences financières sont bien réelles.

Face à ce résultat inattendu, le président de la commission des affaires sociales, Frédéric Valletoux, a demandé une nouvelle délibération, comme le permet le règlement parlementaire. Cette seconde lecture, prévue à l’issue de l’examen de la partie « recettes » du budget, pourrait corriger la situation et éviter un déséquilibre majeur pour la branche vieillesse.

Entre fiscalité et équilibre budgétaire

La suppression de la C3S représenterait un manque à gagner de 5,4 milliards d’euros, ce qui inquiète plusieurs responsables politiques quant au financement des retraites. Le gouvernement, tout en souhaitant alléger les charges pesant sur les entreprises, privilégie la baisse de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), considérée comme moins risquée pour l’équilibre des comptes sociaux.

Cette affaire illustre aussi les risques liés à la complexité des votes parlementaires et à la manière dont un amendement présenté pour débattre peut se transformer en mesure aux conséquences budgétaires importantes. Entre intention politique et vote réel, l’écart peut coûter très cher. La nouvelle délibération prévue permettra aux députés de décider si la C3S sera effectivement supprimée ou si la situation sera rectifiée.

En attendant, ce couac rappelle que même des dispositifs bien connus peuvent réserver des surprises lorsqu’ils croisent procédures parlementaires et stratégies politiques.

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