Le Sénat s’apprête à examiner un nouveau projet de loi visant à renforcer la lutte contre les fraudes aux aides publiques. Cette proposition, portée par le député de Gironde Thomas Cazenave et adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale en janvier, cible principalement les détournements de dispositifs tels que MaPrimeRénov’ et les certificats d’économies d’énergie.
La fraude aux aides publiques représente un enjeu majeur pour les finances publiques. Selon les estimations de Thomas Cazenave, le coût total des fraudes aux dispositifs d’aides en France pourrait osciller entre 700 millions et 1,6 milliard d’euros par an. Le gouvernement souhaite donc muscler l’arsenal législatif pour mieux encadrer ces dispositifs et prévenir les abus. « Le gouvernement a dans son viseur la fraude organisée, voire industrielle », a déclaré la ministre Amélie de Montchalin.
Un dispositif renforcé contre les fraudes aux aides publiques
L’une des principales mesures du texte vise à combler un vide juridique en permettant la suspension immédiate du versement d’aides en cas de suspicion de fraude. L’objectif est de renforcer le contrôle en amont afin d’éviter que des fonds ne soient indûment perçus avant d’être détectés. Par ailleurs, la loi prévoit un renforcement des échanges entre les différentes administrations concernées, notamment Tracfin et l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), afin d’améliorer la coordination et l’efficacité des contrôles.
Un volet spécifique est consacré aux fraudes dans le secteur de la rénovation énergétique, qui a connu des dérives importantes ces dernières années. Le texte propose notamment d’interdire le démarchage téléphonique pour les travaux d’adaptation des logements au handicap et au vieillissement, afin d’éviter les arnaques ciblant les ménages vulnérables. Il prévoit également de suspendre ou retirer le label RGE (Reconnu Garant de l’Environnement) aux entreprises coupables d’abus graves.
La sénatrice Nathalie Goulet a toutefois exprimé des réserves sur la portée de cette réforme. « Il n’y a pas de texte en trop sur la fraude, mais ce n’est pas le grand soir de la lutte contre la fraude. Cela ne vise qu’une partie des aides », a-t-elle regretté. Elle a déjà déposé plusieurs amendements pour améliorer le texte, notamment en matière de contrôle des identités et d’immatriculation des entreprises, afin d’empêcher la création de sociétés frauduleuses.
Le rapporteur de la commission des affaires économiques, le sénateur Olivier Rietmann, souhaite quant à lui renforcer les pouvoirs de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Il propose d’autoriser l’anonymisation des agents et l’utilisation d’identités d’emprunt pour mener des contrôles plus efficaces.
Enfin, le gouvernement prévoit d’introduire un amendement pour que l’escroquerie aux finances publiques en bande organisée soit considérée comme un acte criminel. Le débat parlementaire prévu les 2 et 3 avril s’annonce donc décisif pour l’avenir de ce texte, qui pourrait marquer une nouvelle étape dans la lutte contre la fraude aux aides publiques.