Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, vient de relancer le débat de l’aide médicale de l’État (AME), que l’extrême droite souhaite, depuis un moment, transformer en « aide médicale d’urgence ». L’examen du projet de loi immigration approche et cette mesure à laquelle Darmanin est favorable divise les ministres.
Alors qu’il avait déclaré en mai dernier être prêt à discuter des modalités de cette aide, le ministre est désormais favorable à la suppression de l’AME, qui permet aux étrangers en situation irrégulière d’avoir accès aux soins. Mise en place en 2000 sous le gouvernement Jospin, l’aide médicale de l’État garantit, pour une année, un ensemble de soins pris en charge intégralement, bien que légèrement moins étendu que celui du régime général de l’Assurance maladie. C’est ce que l’Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (Irdes), une entité indépendante, a tenu à rappeler dans une synthèse publiée au cours de l’été. Cette prestation exclut, par exemple, les frais liés aux cures thermales, à l’aide médicale à la procréation et aux médicaments présentant un service médical rendu faible.
Afin de bénéficier de l’AME, les individus en situation irrégulière doivent formuler une demande, résider en France pendant plus de trois mois et respecter un plafond de ressources spécifique. Ce soutien financé par le budget de l’État a, par exemple, profité à 411 364 étrangers à la fin de l’année 2022, pour un montant d’environ 968 millions d’euros. En outre, près de 86 millions d’euros ont été alloués aux soins d’urgence pour les étrangers non éligibles. L’Irdes souligne que ce total ne représente qu’une fraction minime, soit seulement 0,5 % de la dépense nationale consacrée aux soins de santé et aux produits médicaux en France.
Le projet de transformer l’AME en AMU divise le gouvernement
Cette aide est critiquée depuis des années par le Rassemblement national, qui y voit un moyen de favoriser le « tourisme médical ». Ce point de vue s’est étendu aux élus LR qui estiment que le coût de cette mesure est trop important. Pour rappel, le budget de l’AME en 2023 devrait atteindre 1,2 milliard d’euros contre 904 millions en 2018 et 624 en 2009. C’est dans ce contexte que la droite et l’extrême droite souhaitent transformer l’AME en AMU, et cette dernière sera ainsi centrée sur la prise en charge des situations les plus graves.
Cependant, les détracteurs de cette idée sont nombreux au sein du gouvernement. L’ancien ministre de la Santé, François Braun, ainsi que l’actuel, Aurélien Rousseau, y sont défavorables et défendent des « enjeux de santé publique ». En 2019, 10 % seulement des personnes étrangères sans titre de séjour, interrogées par l’Irdes, mentionnaient la santé parmi leurs raisons de migration. De plus, la moitié des individus éligibles à l’aide bénéficiait effectivement de cette couverture. Cette tendance au taux élevé de non-recours s’explique par une « accumulation d’obstacles administratifs » auxquels les étrangers sont confrontés.
Par ailleurs, cette situation s’est aggravée depuis la réforme du dispositif en 2019, réalisée durant le premier mandat d’Emmanuel Macron. À cette époque, l’Irdes mettait en garde contre toute mesure visant à restreindre les droits octroyés par l’AME, dans le but de lutter contre l’immigration clandestine ou de réduire considérablement les dépenses de santé prises en charge, soulignant que de telles mesures risqueraient probablement de manquer leur objectif.
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