Des documents internes publiés par la commission d’enquête sénatoriale révèlent que l’Élysée, notamment à travers son secrétaire général Alexis Kohler, était bien informé des pratiques frauduleuses de Nestlé concernant les eaux en bouteille, telles que Perrier et Hépar, malgré les risques sanitaires. Ces révélations soulèvent des questions sur les liens entre la présidence et le géant suisse.
La commission sénatoriale sur les eaux en bouteille a récemment publié des documents internes suggérant que l’Élysée était au courant des pratiques de Nestlé depuis au moins 2022. Selon le rapporteur de l’enquête, Alexandre Ouizille, la présidence aurait facilité l’accès de Nestlé aux ministères français malgré les contaminations bactériologiques et virales découvertes dans certains forages. Ces pratiques ont généré une distorsion de concurrence avec les autres producteurs d’eau minérale, un aspect que l’Élysée semble avoir pris en compte sans toutefois réagir de manière adéquate.
Les documents indiquent des échanges réguliers entre l’Élysée et le groupe suisse, renforçant les soupçons de relations étroites. Selon Alexandre Ouizille, ces contacts ont perduré même après l’ouverture de l’enquête sénatoriale en octobre 2024, ce qui montre que l’Élysée n’a pas pris de mesures concrètes pour protéger la concurrence ni assurer la transparence sur ces pratiques.
Le refus d’Alexis Kohler de se présenter
Le secrétaire général de l’Élysée, Alexis Kohler, a été invité à se présenter devant la commission d’enquête ce mardi 8 avril pour répondre des accusations portées contre l’Élysée et les relations avec Nestlé. Cependant, Kohler a décliné l’invitation en invoquant un motif de séparation des pouvoirs, une position qui a suscité de vives critiques, notamment de la part de la commission. Alexandre Ouizille a exprimé son incompréhension face à ce refus, rappelant que les commissions d’enquête ont la possibilité de convoquer des responsables politiques afin de garantir la transparence et la responsabilité.
Le manque de coopération d’Alexis Kohler a conduit la commission à se contenter de 74 pages de documents transmis par l’Élysée, qui révèlent l’étendue des échanges entre la présidence et Nestlé. Ces documents contiennent des emails et des notes confirmant les contacts réguliers entre l’Élysée et le groupe, notamment à travers des réunions entre Kohler et des responsables de Nestlé.
L’implication de Nestlé et les conséquences
Les documents dévoilés par le Sénat montrent également que Nestlé n’a pas agi seul dans cette affaire. Le 10 octobre 2024, Laurent Freixe, directeur général de Nestlé, accompagné de Muriel Lienau, présidente de Nestlé Waters, a rencontré Alexis Kohler pour discuter des relations entre l’entreprise et les ministères français. Cette rencontre a eu lieu alors même que l’enquête sénatoriale était déjà active.
Par ailleurs, un lobbyiste de Nestlé, Nicolas Bouvier, a relancé le secrétariat de Kohler le 14 octobre 2024, après qu’il ait promis de fournir des contacts à solliciter au sein des ministères français. Ces échanges mettent en lumière l’influence du lobbying sur les décisions politiques concernant la gestion des ressources en eau, ainsi que l’absence de contrôle sur les pratiques sanitaires de l’entreprise.
Les suites de l’affaire et les répercussions politiques
L’absence de Kohler à la commission d’enquête a relancé les interrogations sur les relations entre l’Élysée et Nestlé, ainsi que sur l’efficacité de la législation environnementale et la régulation des pratiques de grandes entreprises. Bien que la commission ait envisagé de porter l’affaire devant la justice, elle a décidé de se concentrer sur la modernisation des procédures parlementaires, afin de garantir que les pouvoirs du Parlement soient respectés.
Cette affaire met en évidence non seulement les pratiques douteuses de Nestlé, mais aussi l’implication de l’Élysée dans une protection excessive des intérêts privés, au détriment de la santé publique et de la concurrence loyale. Les documents publiés devraient nourrir le débat public sur le rôle du lobbying et la transparence des institutions politiques face aux enjeux sanitaires et environnementaux.