La marque de luxe Chanel est épinglée par deux stagiaires de France Travail. Sylvie et Isabelle ont fabriqué des pièces que la marque de luxe a vendues sans les rémunérer, selon les révélations de Médiapart.
Certaines pièces fabriquées et vendues par la marque de luxe Chanel appartiennent finalement à des personnes en formation rémunérées par France Travail (ex-Pôle Emploi). Selon Médiapart, qui révèle l’information, l’affaire a éclaté suite aux témoignages de deux stagiaires. « Je trouve ça inadmissible, c’est du travail dissimulé », affirme à médiaSylvie, 55 ans, qui raconte sa mésaventure avec Chanel en compagne de sa collègue Isabelle.
Le 20 avril 2023, elle a pris part à une réunion d’information organisée par France Travail de Millau (Aveyron) pour la présentation d’une formation en maroquinerie chez le gantier Causse. Une formation financée par France Travail (ex-Pôle emploi) via le dispositif AFPR (Action de formation préalable au recrutement). Spécialisée dans la ganterie, Causse s’est, pour rappel, lancée dans la petite maroquinerie en 2016, après avoir été rachetée par Chanel en 2012. Isabelle, la future collègue de Sylvie, était enchantée par cette formation qui est, pour elle, un rêve d’enfance.
Mais, hélas, révèle Médiapart, les deux amies ne termineront même pas leur formation. Elles ont été « éjectées », de la formation, bien que Causse ait déjà promis leur recrutement via un CDD. Mais après les premiers tests subis à l’issue d’une période passée par Isabelle et six autres personnes à apprendre les gestes professionnels sur des pièces d’essai pour Chanel, les choses changent.
Quatre stagiaires ont été évincées, tandis que Sylvie et sa collègue Isabelle ont été retenues. « Vous êtes prêtes ? On va travailler avec du cuir et de vraies pièces, et si elles sont correctes, ça part à la vente », témoigne Isabelle à Médiapart. Des affirmations confirmées par Chanel qui expliquait à Médiapart que « si la pièce confectionnée remplit l’ensemble de nos critères d’excellence, et uniquement dans ce cas, elle peut être commercialisée ».
Dans son témoigne, Sylvie affirmait que tout le monde poursuit la formation à l’issue de laquelle les trois retenues entament une période de trois semaines de « tutorat interne » pour, dit-elle, « voir si vous suivez la cadence de production ». Chaque semaine, une soixantaine de porte-cartes doit être produite.
« Une pratique qui revient à faire travailler gratuitement des employés »
Un rythme dur à tenir, reconnaissent les deux collègues qui affirment produire 65 en trois semaines, contre 95 pour les deux autres personnes. Convoquées dans le bureau trois jours avant la fin du stage, elles se sont vu refuser le contrat, car, leur dit-on, durant les trois mois de formation, Isabelle a épuisé ses droits au chômage, tandis que Sylvie a été rémunérée 723 euros par mois par France Travail.
Enfin, même si Chanel assure à Médiapart avoir gardé cinquante personnes au sein de l’atelier d’assemblage depuis le début des AFPR, soit « 94% des personnes formées », cette pratique revient à faire travailler gratuitement des employés pour Guillaume Bourdic, élu CGT chez France Travail.
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