Pour faire face à la cherté des produits menstruels et faute de moyens, plusieurs Canadiennes se tournent vers des solutions ancestrales, plus économiques, mais surtout moins hygiéniques et plus risquées pour la santé.
La majorité des femmes dépensent chaque année des centaines de dollars en tampons et serviettes hygiéniques, une facture qui ne cesse d'augmenter avec le temps. Cette situation, que déplorent beaucoup de Canadiennes, est le résultat d’un marché qui est « verrouillé » par de gros joueurs, selon les experts.
Les Canadiennes peinent à se payer les produits menstruels
En effet, les produits d’hygiène intime sont jugés trop chers par certaines femmes au Canada. Près du quart d'entre elles affirment qu’elles-mêmes ou leurs proches peinent à avoir assez d'argent pour se procurer des produits menstruels, d’après un sondage mené l’an dernier par l'organisme YouGov.
Pour pallier ce manque de moyens, certaines femmes utilisent des mouchoirs ou des bouts de tissus comme substituts aux produits menstruels. Dre Katherine Rouleau, médecin de famille à l'Hôpital St. Michael's de Toronto, raconte qu'elle observe ce genre de situation chaque année parmi ses patientes les moins nanties. « Il y a un risque de santé très clair si on utilise des produits qui ne sont pas de qualité et si on les laisse en place trop longtemps », explique-t-elle. Ce risque, connu sous le nom de syndrome de choc toxique, peut entraîner l'hospitalisation, voire la mort.
Des prix expliqués par un marché cadenassé
En 2019, l'Association canadienne de santé publique estimait que les femmes allaient débourser en moyenne 6 000$ en produits hygiéniques jetables au cours de leur vie. Au Canada, le prix des articles de soins personnels, y compris les produits menstruels, a augmenté de 3 % entre juin 2023 et juin 2024. Au cours des deux dernières années, la hausse des prix de ces articles a dépassé 10 %, soit près du double de l’augmentation de l’Indice des prix à la consommation.
Pour expliquer cette augmentation des prix, il faut considérer trois principaux facteurs, selon le professeur Jean-Luc Geha, directeur associé de l’Institut de vente à HEC Montréal.
Le professeur Geha pointe d'abord du doigt les fortes augmentations des prix des matières premières, comme le papier et le coton, utilisés dans la fabrication des produits menstruels. De plus, le manque de concurrence serait également responsable de cette hausse. En effet, le marché de ces articles est verrouillé par une poignée de fabricants, dont Procter & Gamble, qui détient les marques les plus populaires, à savoir Tampax et Always.
Enfin, le professeur Geha évoque aussi la politique de gratuité d’Ottawa pour ces produits dans les édifices publics et les lieux de travail assujettis à la réglementation fédérale. Selon lui, cette initiative a beaucoup fait augmenter la demande, exerçant une pression supplémentaire sur les prix.