Avec les règles sur l’acceptation des Programmes de Travailleurs Étrangers Temporaires (PTET) à Ottawa qui changent constamment, plusieurs entreprises, notamment dans le secteur agroalimentaire, ne savent plus à quel saint se vouer. Le gouvernement, cherchant à limiter le nombre d’employés étrangers temporaires à Ottawa, risque de laisser de nombreux postes vacants, impactant ainsi des filières comme l’alimentation et l’agroalimentaire. C’est ce qu’explique le professeur Sylvain Charlebois, spécialiste de l’industrie agroalimentaire à l’Université de Dalhousie, lors d’une entrevue sur la chaîne de télévision Le Canal Nouvelles.
Au cours des dernières semaines, le gouvernement fédéral a annoncé une réduction du programme de travailleurs étrangers temporaires (PTET) à 10 %. Dès le 26 septembre, Ottawa imposera aux entreprises un plafond de 10 % de travailleurs étrangers, limitera la durée de leur permis à un an et refusera les demandes pour des emplois à faible revenu. L’objectif est de donner une chance aux jeunes Canadiens de décrocher un emploi, de lutter contre le taux de chômage qui grimpe sans cesse, et de contribuer à l’économie d’Ottawa.9
Bien que cette décision ait été bien accueillie par plusieurs citoyens, elle pourrait avoir un impact négatif sur le marché de l’emploi au Canada, particulièrement dans le secteur agroalimentaire. Selon Sylvain Charlebois, près de 86 000 immigrants étrangers travaillent dans ce secteur au Canada. Une réduction de ce nombre pourrait donc affecter significativement ce domaine clé.
Le spécialiste a également souligné que la décision du gouvernement est louable, mais arrive avec un an ou deux de retard. Il précise qu’une telle décision pourrait entraîner une hausse des prix alimentaires, car un manque de travailleurs étrangers se traduirait par une pénurie de main-d’œuvre, difficile à combler par des travailleurs locaux.
Selon Charlebois, les emplois actuellement occupés par des travailleurs étrangers sont souvent difficiles et mal payés. Cela inclut non seulement le secteur agroalimentaire, mais aussi les chaînes de restauration rapide. Bien que certains Canadiens pensent que les immigrants occupent des postes qui pourraient être intéressants pour les jeunes, la réalité est toute autre. Les jeunes Canadiens ne sont pas attirés par ce genre d’emplois, et l’absence de main-d’œuvre étrangère pourrait creuser un écart significatif.
Comment Ottawa pourrait-elle s’en sortir face à la réduction des PTET ?
Sylvain Charlebois estime que l’avenir des postes dans le secteur agroalimentaire dépendra principalement de la réaction des industries. Si elles continuent à dépendre de la main-d’œuvre étrangère et des politiques changeantes d’Ottawa, il leur sera difficile de définir une stratégie commerciale claire.
Il ajoute qu’Ottawa tente de résoudre un problème qu’elle a elle-même créé en ouvrant largement la porte aux travailleurs étrangers temporaires pendant des années, sans plan précis. Ces immigrants, gagnant peu, contribuent faiblement à l’économie du pays, selon le spécialiste.
Ce manque de transparence et de vision à long terme pourrait indéniablement affecter le marché de l’emploi, les prix des aliments et l’économie canadienne dans son ensemble.
Comme solution, Charlebois propose l’introduction de systèmes automatisés et de robots, en particulier dans le secteur de la restauration. Plutôt que de dépendre d’une main-d’œuvre volatile et peu fiable, pourquoi ne pas investir dans la technologie et l’automatisation ?
Il conclut en déplorant les décisions gouvernementales, souvent plus motivées par des considérations politiques que par les réalités du terrain. Il appelle à une stratégie cohérente et adaptée à la réalité, qui permettrait aux entreprises de planifier sur le long terme avec des informations claires et concrètes.