La baisse de la natalité est un souci majeur pour les pays occidentaux, notamment en France. Des solutions ont été apportées, mais la baisse se poursuit. En janvier 2024, Emmanuel Macron a appelé au « réarmement démographique » du pays via deux mesures phares : la lutte contre l’infertilité et la réforme du congé parental.
- France est l’un des pays occidentaux où la natalité est la moins dégradée
- Selon le spécialiste, les solutions du président Macron n’auraient qu’un impact minime sur la natalité
- Il propose de « forfaitiser les allocations familiales en fonction de l’unité enfant et non plus en fonction de son rang dans la fratrie » ainsi qu'une allocation d’un montant mensuel d’environ 70 euros par enfant
- Selon lui, les caisses d’allocations familiales devraient tout faire pour encourager les rencontres entre célibataires, y compris en finançant les mécanismes
L’ancien directeur de la recherche à la Caisse nationale des allocations familiales, Julien Damon, propose, pour sa part, plusieurs pistes. Il préconise d’axer le travail sur la prise en charge de la petite enfance en impliquant les caisses d’allocations familiales. Il va même jusqu’à proposer une solution des plus originales.
Estimant que la baisse de la natalité en France n’atteint pas un stade aussi alarmant, Julien Damon fait remarquer, dans un entretien au journal l’Express, que la France est l’un des pays occidentaux où la natalité est la moins dégradée. « Ensuite, le niveau incontestablement bas que nous enregistrons aujourd’hui, de l’ordre de 1,7 enfant par femme en indice conjoncturel, nous l’avons déjà connu au début des années 1990 », observe-t-il, non sans reconnaître que « la tendance actuelle est préoccupante au sens où la baisse est continue depuis plus d’une dizaine d’années et qu’elle semble même s’accélérer ».
Julien Damon considère comme insatisfaisantes les explications données couramment à la baisse de la fécondité, en citant l’exemple de la réduction des avantages fiscaux liés à la présence d’enfants et la modulation des allocations familiales. Il estime aussi que les solutions du président Macron n’auraient qu’un impact minime. En revanche, l'ancien directeur de la recherche à la Caisse nationale des allocations familiales affirme que « d’après les économistes et les démographes, ce sont bien les aides en matière de garde d’enfants qui soutiennent la fécondité, en ce qu’elles permettent aux parents, et singulièrement aux mères, d’équilibrer travail et vie familiale ».
C’est dans les pays où elles travaillent que les femmes font des enfants contrairement au passé, rappelle-t-il pour mettre en évidence l’intérêt d’impliquer les caisses d’allocations familiales dans le registre des solutions qu’il préconise dans son livre Les Batailles de la natalité, à paraître le 30 août aux Éditions de l’Aube. « Plus largement, l’accueil de la petite enfance doit être renforcé en France. C’est le pan des politiques familiales qui a le plus d’incidences potentielles en termes de fécondité », note-t-il.
D’ailleurs, justifie-t-il, en 2023, les Français ayant renoncé à avoir des enfants évoquaient notamment en premier le désaccord ou l’absence de conjoint, suivi par la disponibilité et les coûts des modes de garde.
Les CAF pourraient financer les mécanismes de rencontres des célibataires
Il faudrait franchir une nouvelle étape, au plus près des besoins, et doter les communes d’une compétence obligatoire à proposer une offre, en lien avec les caisses d’allocations familiales, recommande Julien Damon, en estimant que « le modèle, fondé sur la progressivité des allocations et des réductions d’impôt, a vécu ». L’essayiste propose de « forfaitiser les allocations familiales en fonction de l’unité enfant et non plus en fonction de son rang dans la fratrie ». Aujourd’hui, pour enclencher la dynamique, il faut que le premier enfant, au même titre que les suivants, devienne une cible clairement définie du système des prestations familiales, estime-t-il, tout en préconisant une allocation d’un montant mensuel d’environ 70 euros par enfant, pour plus de simplicité et d'équité.
Plus loin, Julien Damon estime que les caisses d’allocations familiales devraient tout faire pour encourager les rencontres entre célibataires, y compris en finançant les mécanismes. « Les CAF financent déjà de la médiation familiale en cas de séparation. Pourquoi ne financeraient-elles pas du conseil matrimonial, pour les individus seuls, sans ou avec enfant(s), qui souhaitent se (re)lancer dans l’aventure à deux ? » affirme-t-il. Pour ce faire, détaille-t-il, il y a deux possibilités : la création d’un grand service public de la rencontre, en complément ou en remplacement des sites comme Meetic ou Tinder, ou éventuellement des chèques ou des bons permettant d’avoir accès à ces outils numériques. « Pour les adeptes de la drague à l’ancienne, les pouvoirs publics pourraient aussi soutenir les bars, restaurants et salles de sport qui organisent des moments de rencontre. Et pourquoi pas un bal de la CAF ? » argue-t-il.