Comment unifier le taux de change du marché noir et du marché officiel (expert)

Par Pika O. Publié le 25 février 2024 à 15h20
Taux de change : l’euro et le dollar à un niveau élevé sur le marché noir en Algérie
Taux de change : l’euro et le dollar à un niveau élevé sur le marché noir en Algérie

L'Algérie est caractérisée par un double taux de change. Le marché de change en Algérie, comme plusieurs pays en développement, est caractérisé par l'existence de deux types de marché, le premier type est officiel et le second est qualifié de "marché noir". Entre les deux marchés, le décalage du taux peut atteindre de grandes proportions.

L'existence de ce marché noir des devises nuit à l'économie nationale. Depuis plusieurs années, les gouvernements successifs ne cessent d'annoncer des mesures pour venir à bout de ce marché, en vain. Son existence répond à une demande. Pour se débarrasser de ce marché, les économistes plaident pour une politique monétaire qui le rend inutile.

Les ministres des Finances ont successivement annoncé depuis 2016 le lancement des bureaux de change officiels qui devraient faire de l'ombre au marché parallèle. Cependant, l'ouverture de ces bureaux n'a pas été concrétisée. Elle aura lieu au courant de l'année en cours, selon les dernières déclarations des responsables du secteur.

L'expert international Abdelrahmi Bessaha plaide pour sa part pour l'unification de ces deux marchés de change. Dans sa contribution publiée dans le journal El Watan, cet expert affirme que la « dualité de taux, résultat de déséquilibres macroéconomiques et de rigidités structurelles diverses, est source de distorsions multiples qui contraignent fortement le fonctionnement de l’économie nationale et bloquent son potentiel de croissance ».

Il indique que « le retour rapide à une unification des taux (article 145 de la nouvelle loi monétaire et bancaire du 21 juin 2023) et le passage à un taux d’équilibre du marché est incontournable pour éliminer les distorsions et les inefficacités imposées à l’économie par un taux officiel qui ne correspond pas à la réalité économique ».

Toutefois, Abdelrahmi Bessaha souligne qu' « une telle unification est un processus complexe qui implique une démarche rigoureuse et la mise en place de nouvelles politiques macroéconomiques et des réformes structurelles pour créer les conditions idoines pour la détermination d’un taux d’équilibre du marché. Toutes ces réformes doivent alors s’articuler dans le contexte de la refondation d’un nouveau modèle économique et social ».

Les étapes nécessaires pour arriver à un taux de change unifié

Le même expert qui souligne que conduire le dinar algérien vers sa valeur d’équilibre est un processus complexe, technique et long, préconise une feuille de route déclinée en 5 volets. Il s'agit d'abord du volet de la diversification économique qui devrait mettre en place « un modèle de production reposant sur une variété de secteurs d’activité devant améliorer les perspectives de croissance à long terme ».

Le deuxième volet est macroéconomique. L'expert explique que « pour soutenir la compétitivité extérieure et éviter les fluctuations du taux de change réel et la surévaluation réelle, le mix comprendra trois points ». Il s'agit de l'assainissement budgétaire progressif et soutenu avec une politique monétaire ciblant la réduction des tensions inflationnistes. Il préconise également « une plus grande flexibilité du taux de change pour soutenir les efforts de stabilisation »,

Le troisième volet concerne l'ouverture commerciale. Cette ouverture devra impliquer « l’élimination des restrictions et barrières tarifaires et non-tarifaires pour engranger des gains de productivité et faciliter la diversification », explique l'expert en ajoutant qu'une « discussion avec l’UE pour réaménager l’AAUE (après avoir adopté une stratégie de baisse progressive des barrières tarifaires et non-tarifaires) » est nécessaire pour ensuite mettre en place des incitations à « l'investissement plus neutres pour encourager la diversification des exportations » et enfin « l'accélération des discussions pour une adhésion à l’OMC ; et (5) des mesures diverses pour attirer des investissements directs étrangers (IDE) ».

Les axes importants pour atteindre l'unification du taux de change

Le quatrième volet concerne la diversification des exportations et le cinquième touche l'unification des marchés de change autour de 4 axes. Il s'agit d' « identifier et évaluer les impacts d’une dépréciation sur les canaux (commerce international et secteur financier) par lesquels l’unification des taux de change (essentiellement une dépréciation du taux officiel) vont se répercuter sur les divers segments de l’économie ».

Il faut également, selon cet expert, « déterminer un taux de change d’équilibre pour l’économie qui serait compatible avec la stabilité macroéconomique et extérieure à moyen terme ». « Déterminer un horizon temporel pour entamer la transition vers ce taux d’équilibre soit par le biais d’une approche qui unifie le taux de change instantanément ou une approche progressive s’étendant sur plusieurs semaines, voire plusieurs mois » est le troisième axe préconisé par Abdelrahmi Bessaha qui conclut qu'« une politique de communication pour offrir la visibilité sur la démarche des autorités et rassurer les différents agents économiques » est le dernier axe pour arriver à l'unification des taux de change.

Pika O. journaliste francophone. Je couvre différents sujets d'actualité, notamment l'économie

Suivez-nous sur Google News Econostrum.info - Soutenez-nous en nous ajoutant à vos favoris Google Actualités.

2 commentaires on «Comment unifier le taux de change du marché noir et du marché officiel (expert)»

  • Abdel

    Bonjour
    Je pense que la banque remonte sans taux de change égal à ce lui du marché noir, pour une concurrence directe sur durée du année
    Une fois éradiquer les combiste on revient à un taux de change normal

    Répondre
  • Kamil

    Le Nigeria a tenté d’unifier le taux change de sa monnaie vis à vis des devises. Le résultat est catastrophique ; le Naira s’échange à 1600 contre le dollar; il était il y a quelques mois à hauteur de 400 taux officiel. L’inflation est actuellement à hauteur de 40%.

    C’est un grand risque ; sans suffisamment diversifier les exportations, il convient d’éviter ce suicide.

    Répondre
Laisser un commentaire

Les Commentaires sont soumis à modération. Seuls les commentaires pertinents et étoffés seront validés. - * Champs requis