Le Conseil constitutionnel a rendu, mardi 28 mai, une décision relative à l’aide juridictionnelle en faveur des étrangers résidant de manière irrégulière sur le sol français. Jusque-là, ces derniers en étaient exclus au motif de l’irrégularité de leur séjour.
L’aide juridictionnelle est un dispositif assumé par l’État pour la prise en charge du coût d’une procédure de justice à la place de la personne concernée si cette dernière ne dispose pas de ressources financières suffisantes. La loi française en place depuis 1991 excluait jusque-là les personnes étrangères qui résident de manière irrégulière en France.
Le Conseil constitutionnel a mis fin à cette exclusion des clandestins, mardi 28 mai, suite à une saisine, le 1ᵉʳ mars dernier, initiée par la Cour de cassation, portant trois questions prioritaires de constitutionnalité. Ces questions, note un communiqué du Conseil, concernent la conformité du deuxième alinéa de l’article 3 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France, aux droits et libertés garantis par la Constitution.
Le deuxième alinéa de l’article 3 de la loi prévoyait que seules « les personnes de nationalité étrangère résidant habituellement et régulièrement en France sont également admises au bénéfice de l’aide juridictionnelle ». Les requérants reprochent, explique le conseil, à ces dispositions de subordonner pour les étrangers le bénéfice de l’aide juridictionnelle à la régularité de leur séjour en France.
Le Conseil constitutionnel admet les reproches des requérants
En excluant par principe les étrangers en situation irrégulière du bénéfice de cette aide, « elles (les dispositions, NDLR) institueraient ainsi une différence de traitement injustifiée. Il en résulterait une méconnaissance du principe d’égalité devant la loi », ont plaidé les requérants. Le Conseil constitutionnel a admis ce reproche. D’où sa décision de censurer cet article 3 qui ne prévoyait cette aide aux résidents étrangers irréguliers que sur dérogation, notamment pour les enfants mineurs.
Dans sa réflexion, le conseil mentionne s’être notamment basé sur l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, qui dit que la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse », et sur son article 16 qui dispose que « toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée ni la séparation des pouvoirs déterminée n’a point de Constitution ».
Les sages ont conclu de fait que « les dispositions contestées n’assurent pas » aux résidents étrangers irréguliers « des garanties égales à celles dont disposent les autres justiciables » et les déclarent donc « contraires à la Constitution ». Par conséquent, ils ont tranché la suppression du mot « irrégulièrement » figurant au deuxième alinéa de l’article 3 contestée.
La loi ainsi censurée et corrigée « sera publiée au Journal officiel » et « prend effet immédiat », conclut la déclaration du Conseil constitutionnel. Ce qui permettra, désormais, aux résidents irrégulièrement installés sur le sol français, y compris ceux sous le coup d’une obligation de quitter le territoire (OQTF), de bénéficier de cette aide juridique.