Crédit d’impôt recherche : le beau tuyau des entreprises pour détourner la plus grosse niche fiscale française

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Par Djaffar Chilab Publié le 4 décembre 2023 à 15h21
Crédit d'impôt recherche : le beau tuyau des entreprises pour détourner la plus grosse niche fiscale française
Crédit d'impôt recherche : le beau tuyau des entreprises pour détourner la plus grosse niche fiscale française - © www.econostrum.info

Le crédit d’impôt recherche (CIR), censé contribuer à préserver la compétitivité des entreprises françaises, au-delà de l’enveloppe faramineuse qu’il coûte, ne semble pas suffisamment cadré en matière de garde-fous pour canaliser ses montants dédiés exclusivement à la recherche.   

Souvent cité en exemple, le CIR alimente la recherche qui permettrait aux entreprises françaises de suivre les innovations du moment et, partant, la compétitivité des marchés, bien que des voix s’élèvent ces dernières années pour révéler des détournements astucieux de la part de certaines entreprises. Le crédit d'impôt recherche (CIR) a fêté cette année ses quarante ans, autant d’années à ravir les entreprises. « Evalué à 7 milliards d'euros par an, il s’agit de la plus grosse niche fiscale française, bâtie pour stimuler les activités de recherche et développement (R&D). Elle permet aux sociétés tricolores d'économiser jusqu'à 30% de leurs dépenses en R&D engagées en Europe », commente Capital. 

Les chiffres des gains amassés via ce dispositif sont, indique Capital, de l’ordre de 136 millions pour Renault en 2022, 48,9 millions pour Engie, 32,5 millions pour Dassault Aviation… « Cela m'a permis de payer des chercheurs français de très bon niveau au même prix que des ingénieurs chinois ou indiens », reconnaît cet ex-directeur R&D d'un groupe industriel, cité par Capital. « Beaucoup de start-up et de PME françaises qui ont créé des emplois n'existeraient pas sans le CIR», ajoute Julien Soilly, directeur fiscal au sein du cabinet B.Conseil.

Jusque-là, les choses paraissent cohérentes. Mais voilà que le Conseil d'analyse économique, institution rattachée au Premier ministre, dénonçait, dans un rapport récent, « une dépense fiscale élevée dont l'efficacité est faible », notamment les grands groupes qui capturent plus de 70% des crédits. « Le CIR, c'est un chèque en blanc signé aux entreprises. Il n'y a pas d'évaluation de la qualité de la science. Dans la recherche publique, le moindre euro doit être arraché et justifié», reproche Boris Gralak, secrétaire général du syndicat de chercheurs SNCS-FSU.

Les grands groupes capturent plus de 70% des crédits

Sanofi, le fleuron pharmaceutique français, est un des exemples pointés, « économiserait environ 100 millions d'euros chaque année grâce au CIR ». A vrai dire, même si des connaisseurs soutiennent « les fraudes délibérées liées au CIR sont rares », plusieurs autres sons de cloches trouvent que le crédit d'impôt profite à des activités qui ne relèvent pas de la R&D. « La loi ne peut pas définir de façon exhaustive les activités de recherche. Les textes sont donc suffisamment génériques pour laisser une marge d'interprétation », explique un expert juridique.

La stratégie des entreprises consiste, en fait, à rattacher des dépenses qui, a priori, ne peuvent être répertoriées dans un projet de recherche développement. «Il y a peut-être 30% des dossiers où nous avons un peu embelli les choses… Mais les 70% restants, c'était de la vraie innovation», chiffre l'ancien directeur R&D, cité par Capital. Cela étant, l'administration fiscale reste néanmoins très loin de rattraper les fuites évoquées : « En 2020, les redressements liés au CIR s'élevaient seulement à 146 millions d'euros, soit moins de 3% de la niche fiscale. Un faible montant qui pour certains révèle surtout un manque de contrôles », soutient-on pendant que d’autres appels à réduire les montants accordés dans ce cadre aux groupes se multiplient.

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Licencié en économie option gestion, journaliste polyvalent, reporter, et ancien directeur de rédaction.

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